Tzipi Livni

Ministre israélienne des Affaires étrangères et nouvelle présidente du Kadima

Publié le 21 septembre 2008 Lecture : 3 minutes.

Tzipi Livni a été bien inspirée en demandant de retarder d’une heure la fermeture des bureaux de vote. Ses concurrents s’y sont opposés, mais la commission électorale a coupé la poire en deux et concédé une demi-heure. Laps de temps qui a permis à la ministre des Affaires étrangères de l’emporter, en ne dépassant Shaul Mofaz, ministre des Transports, que de 431 voix. Les primaires qui ont eu lieu ce 17 septembre au sein du Kadima (parti centriste, au pouvoir) ont été assurément cruciales puisqu’elles ont désigné un nouveau leader et, partant, un successeur à Ehoud Olmert à la tête du gouvernement. Elles n’ont cependant déplacé qu’à peine la moitié des 74 000 adhérents du parti. Et cette courte victoire de Livni ne manquera pas de peser sur la suite des événements.

Ehoud Olmert, Tzipi Livni. Jamais personnalités ne furent aussi dissemblables. Lui, politicien chevronné, séducteur, la blague facile, bon vivant, cigares, montres et autres accessoires bling-bling, n’hésite pas à prendre des accommodements avec la morale. Elle, tailleurs stricts, maquillage minimum, économe en mots, tient à payer ses consommations – même un plat de houmous -, n’aime guère les mondanités et vit dans un appartement modeste à Tel-Aviv avec son mari et leurs deux garçons. Chez elle, plus qu’une attitude, c’est une éthique. « Le système politique, dit-elle, ne génère pas automatiquement la corruption. » C’est en tout cas cette réputation de « Mme Mains Propres » qui distingue Tzipi Livni dans la classe politique et explique sa popularité.
Son itinéraire n’est pas commun non plus. Née à Tel-Aviv en 1958, elle a grandi dans une famille ultrasioniste. Ses parents ont appartenu à l’Irgoun, l’organisation qui a combattu les Britanniques et les Arabes dans les années 1940. Lieutenant dans l’armée, elle bifurque vers le Mossad (services de renseignements israéliens). De 1980 à 1984, elle exerce ses talents d’espionne en Europe, où elle participe à la traque des militants palestiniens. Son rôle était-il logistique ou opérationnel ? Pour répondre aux critiques sexistes, elle répliqua récemment : « Ce n’est pas parce que je suis une femme que je serai un leader faible. Je n’ai aucun problème pour appuyer sur la détente lorsque c’est nécessaire. » Autorisée à quitter les services, elle se marie et reprend ses études de droit. Elle sera avocate d’affaires, comme Olmert.
Entrée en politique sur le tard, elle devient députée en 1999 sous les couleurs du Likoud (droite). Le Premier ministre Ariel Sharon la prend sous son aile et lui confie plusieurs ministères : Coopération régionale, Agriculture, Immigration, Logement, Justice, Intégration, Affaires étrangères. En 2005, lorsque son mentor décide d’évacuer Gaza, elle l’approuve sans états d’âme et le suit naturellement dans la création de Kadima. Après la sortie de scène du Bulldozer en avril 2006, Olmert lui succède à la tête du parti et du gouvernement. Il reconduit Livni aux Affaires étrangères et la nomme deuxième vice-Premier ministre. Sur la question cardinale de la Palestine, elle opère une révision déchirante en passant de l’irrédentisme à un pragmatisme qui n’exclut pas la paix. À l’instar d’Olmert, elle se résigne à la création d’un État palestinien pour éviter la dissolution à terme – démographie oblige – du caractère juif d’Israël.
Telle est Tzipora Livni, appelée à s’asseoir dans le fauteuil qu’a occupé Golda Meir de 1969 à 1974. Sera-t-elle à la hauteur de son prestigieux modèle ? « Je sais, dit-elle, que je peux faire le job. » L’épreuve du feu sera la formation du gouvernement. Une gageure au regard des résultats des primaires. Fort des 42 % qu’il a obtenus, Mofaz sera très exigeant. Déjà, il menace de rejoindre son Likoud d’origine. Autre obstacle : le Shass. Le parti intégriste accepte mal qu’une femme dirige le gouvernement et refuse qu’on parle de Jérusalem avec les Palestiniens.
Dans ces conditions, les grands dossiers de la guerre et de la paix (négociations avec l’Autorité palestinienne, la Syrie, l’Iran) risquent de rester en souffrance.
On voit bien ce que devrait être l’agenda de Tzipi Livni : former le gouvernement, consolider Kadima et aller aux élections de 2010 avec de sérieuses chances de battre le Likoud de Benyamin Netanyahou. Seulement voilà, les acteurs alentour ont peut-être d’autres priorités. Et il ne serait pas étonnant que la « Dame de fer », soit rapidement jugée non sur ce qu’elle a prévu, mais sur ce qu’elle n’attend pas. Au Moyen-Orient, l’imprévu, toujours, arrive.

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