(In)compétence universelle

Publié le 21 septembre 2008 Lecture : 2 minutes.

Ouverte le 16 septembre à New York, la traditionnelle Assemblée générale de l’ONU offre l’occasion à bon nombre de chefs d’État du continent de prononcer des monologues à usage domestique depuis une tribune des plus prestigieuses, même si la salle est souvent aux trois quarts vide. Un rituel qui, cette année, pourrait cependant connaître un regain d’intérêt. Pas seulement parce que l’organisation célèbre le 22 septembre une « Journée de l’Afrique ». Pas seulement parce qu’un pays africain – le Burkina Faso – exerce jusqu’à la fin de ce mois la présidence du Conseil de sécurité. Mais surtout parce qu’un groupe très déterminé de présidents africains entend profiter de l’occasion pour mettre sur la table un sujet qui fâche : la « compétence universelle » des juges du Nord à l’égard des dirigeants du Sud.
La fronde a éclaté en juin dernier, à la suite d’une première mondiale : la mise en cause par la Cour pénale internationale du chef de l’État soudanais Omar el-Béchir. Relayée par l’Union africaine, à l’instigation du Rwandais Paul Kagamé, elle a depuis pris de l’ampleur. Dernier épisode en date : le bras de fer judiciaire entre Dakar et Paris à propos de l’affaire du Joola (voir pp. 32-35). Bien décidé à réagir et imitant en cela son homologue de Kigali, Abdoulaye Wade menace Paris de réciprocité : procédure contre procédure, inculpation contre inculpation, mandat d’arrêt contre mandat d’arrêt. De loin la plus concernée par cette guérilla malsaine – pas moins de six affaires impliquant des dirigeants africains sont pendantes devant les tribunaux parisiens -, la France est en quelque sorte piégée par sa ligne de défense : l’indépendance de sa justice. Sauf à émettre des procès d’intention, elle est en effet bien obligée de respecter ce principe chez ses interlocuteurs, y compris africains.
Même si ceux qui critiquent la CPI et les juges européens le font souvent pour de mauvaises et indicibles raisons, force est de reconnaître que l’action parfois irresponsable de magistrats pour qui la compétence universelle se résume à une simple compétence africaine pose problème. Le malaise est réel. Les accusations de racisme et de « deux poids deux mesures » ne sont pas loin. Pour sortir de ce tête-à-tête aussi épuisant qu’inutile, l’Afrique n’a pas d’autre choix que d’imposer sa crédibilité en jugeant elle-même ses propres délinquants. L’UA s’est engagée à mettre en place une Cour africaine de justice et a mandaté le Sénégal pour juger Hissein Habré. C’était en 2006. On attend encore.

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