Le « testament » de Konaré

Publié le 21 janvier 2007 Lecture : 2 minutes.

Lorsqu’il a été élu, en 2003, Alpha Oumar Konaré nourrissait de grandes ambitions pour l’UA, et voulait précipiter la marche vers les États-Unis d’Afrique. Il rêvait de moyens qu’on ne lui a jamais donnés. « AOK », comme on l’appelle familièrement, a offert à l’Afrique une visibilité sur la scène diplomatique. Il a été son visage et sa voix. Mais, il le reconnaît sans ambages, il avait sous-estimé les difficultés : « Je pensais que certains dirigeants se disant sincèrement attachés à la réussite de l’UA exprimeraient davantage leur leadership » Doté d’un budget croupion, flanqué de commissaires qu’il n’a eu ni la liberté de choisir ni celle d’affecter, confronté en permanence à la mauvaise volonté et à l’inconséquence de pays membres jaloux avant tout de leur souveraineté, il a plus d’une fois eu envie de rendre son tablier. Son enthousiasme s’est émoussé, et il a annoncé à Banjul qu’il ne solliciterait pas le renouvellement de son mandat en juillet prochain. Mais il n’a pas abdiqué pour autant : « Je me battrai jusqu’au bout pour une réforme des institutions actuelles, hybrides et insatisfaisantes ; pour une redéfinition des contours de la Commission, qui était censée être un exécutif supranational, mais qui ressemble encore beaucoup trop à un secrétariat, façon OUA. Ce sera mon testament »
Konaré, qui ne veut surtout pas se hasarder à dessiner un portrait-robot de son successeur, est plus que jamais déterminé à poursuivre la bataille pour les États-Unis d’Afrique. « Désunie, l’Afrique n’a aucun pouvoir de négociation. Que pèsent le Nigeria, l’Algérie ou l’Afrique du Sud face au Brésil, à l’Inde, la Chine ou l’Europe ? Nos partenaires naturels sont des pays-continents. Nous, nous devons accomplir le chemin inverse : nous sommes un continent qui doit devenir un pays. Nous avons échoué à le faire par le haut. J’ai maintenant la conviction que c’est par le bas que nous pourrons inverser la tendance : en sensibilisant les citoyens africains, en favorisant une appropriation populaire de l’idée panafricaine, en faisant émerger une opinion publique africaine, qui fasse pression sur ses dirigeants. C’est à cela que je veux désormais consacrer mon énergie. »
À l’entendre, on imagine sans peine le Konaré de demain à la tête d’une sorte de fondation, animant débats et conférences, et ruant dans les brancards. AOK, infatigable aiguillon de l’intégration, conscience morale du continent ? Le rôle ne serait vraiment pas pour lui déplaire. Au fond de lui-même, l’ancien président malien est resté un universitaire. Son côté professoral, donneur de leçons (démocratiques), qui agaçait et a peut-être été à l’origine de certaines déconvenues avec ses pairs, lui colle à la peau. Mais l’Afrique a besoin d’hommes de sa trempe pour progresser sur la voie de l’unité. C’est une idée trop importante pour être laissée entre les mains des seuls chefs d’État

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