Ce qu’est vraiment le djihad

Une étude rondement menée présente les différents aspects de cette fameuse guerre sainte au cours des siècles. Et rappelle sa dimension avant tout spirituelle.

Publié le 20 juillet 2008 Lecture : 2 minutes.

Pour les Occidentaux, le djihad, c’est la guerre sainte, et la preuve que la violence est inhérente à l’islam. Ce terme, il est vrai, est placé chaque jour sous les feux de l’actualité, et de bien sinistre manière, par l’action de terroristes qui prétendent défendre les valeurs de la religion musulmane.
Cette utilisation militaire du djihad cache une autre de ses dimensions, qui est d’ordre moral et spirituel. Étymologiquement, le mot vient du verbe djâhada, qui signifie « faire un effort », et s’apparente à l’ijtihad, qui est l’effort que doivent effectuer les jurisconsultes pour interpréter la loi divine afin de l’appliquer aux diverses circonstances de la vie. Si donc le djihad apparaît fréquemment dans le Coran, c’est surtout pour exhorter le croyant à lutter contre ses passions et ses mauvais penchants afin de s’améliorer et d’améliorer la société. Aussi les docteurs de la loi font-ils la distinction entre le « grand djihad », qui est ce combat que tout musulman doit mener pour rester dans le chemin de Dieu, et le « petit djihad » que constitue la lutte (au départ strictement défensive) contre les « infidèles ».
C’est une présentation des différents aspects qu’a pris cette fameuse guerre sainte au cours des siècles que, dans un petit essai rondement mené, proposent Michel Guérin et Jean-Luc Marret. Le premier est contrôleur général de la police ; le second, membre de la Fondation pour la recherche stratégique de Paris, est détaché à l’université Johns-Hopkins de Washington.

Instrument de mobilisation
« Si, en tant que tel, le djihad est apparu avec la Révélation islamique, rappellent-ils au départ, ses origines sont sans doute à chercher dans les coutumes d’avant l’apparition de l’islam. Il a pris forme durant la vie du Prophète à travers ses actions et a ensuite été théorisé par les juristes et les théologiens, au même titre que les autres articles de la foi dont il fait partie. »
Le petit djihad prit tout son sens pendant les croisades, du XIe au XIIIe siècle de l’ère chrétienne, en devenant un instrument de mobilisation contre l’envahisseur. La lutte anticoloniale s’en saisira à son tour. Mais il fut sollicité également pour s’opposer à un pouvoir injuste accusé de corrompre la loi musulmane. Des révoltes anticalifales à Al-Qaïda en passant par les Frères musulmans, on retrouve la même idée de lutte contre des régimes « impurs ».
Michel Guérin et Jean-Luc Marret ne se contentent pas de généralités historiques. Leur livre fourmille d’anecdotes et d’éclairages originaux (« Le djihad des femmes », « Le djihad sur mer », « Djihad et soufisme », etc.) pour déboucher sur une galerie de portraits de djihadistes contemporains, de Sayyid Qutb à Aymen al-Zawahiri en passant par Abdallah Yusuf Azzam.
Le djihad, donc, n’est pas un mais multiple. Il a été tour à tour arme d’expansion ou de conquête, outil répressif, moyen de défense, levain de révolte. Mais il a également toujours été dirigé vers l’introspection individuelle, fonction à laquelle il devrait se réduire aujourd’hui si la religion n’était instrumentalisée par les uns et les autres. Accaparé par des minorités violentes, il fournit, hélas, le prétexte idéal pour condamner l’islam dans son ensemble.

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