Dieu et la Poste
Publié le 20 mars 2005 Lecture : 2 minutes.
Le grand débat de l’heure en Europe, c’est celui du multiculturalisme. Les sociétés changent, elles se fractionnent en communautés, les loyautés évoluent ou se disloquent, etc. Graves questions qui requièrent d’augustes penseurs qu’on retrouve généralement dans les pages intérieures de l’intelligent.
En revanche, nous tenons à évoquer ici un aspect bien moins connu des avatars du multiculturalisme, qui est celui du courrier adressé à Dieu. Si, si, c’est très sérieux. Du moins en Hollande. Aujourd’hui, toutes les lettres adressées à Dieu et confiées au service profane de la Poste hollandaise sont dirigées vers un service ad hoc, composé de volontaires chrétiens. Ceux-ci ouvrent les lettres et les divisent en trois tas. Celles qui contiennent des requêtes somme toute inoffensives, genre « Mon Dieu, faites que j’aie le bac », « Jésus, aide ma grand-mère à retrouver son chat », sont traitées avec charité et discrétion : le petit groupe, agenouillé autour de la missive, accomplit une courte prière. Puis la lettre, dont l’esprit s’est envolé pour rejoindre le Saint-Esprit, disparaît au fond d’un placard. Dans trente ans, délai légal, elle sera détruite. Entre-temps, le petit chat est mort ou la grand-mère l’a retrouvé, le bac n’est plus qu’un souvenir, etc.
Quant aux quelques lettres qui annoncent à l’Éternel la prochaine perpétration d’un crime, elles sont dispatchées vers la police. Celles qui évoquent un suicide sont envoyées aux services sociaux. Dieu n’a pas que ça à faire.
Mais voilà que l’Union des mosquées d’Amsterdam (et environs) vient de lancer un pavé dans la mare. Qu’en est-il des lettres adressées à Allah ? Certes, nous sommes tous les enfants du bon Dieu, mais un Turc ou une Marocaine qui se fend d’une missive en direction d’Allah n’a pas forcément envie de la voir interceptée par des adeptes de la Trinité. De plus, si la lettre est écrite dans la langue d’Abu Nûwas ou dans celle d’Atatürk, comment vont faire ces blonds Infidèles pour la lire ? Ne seraient-ils pas tentés de l’envoyer illico à la police puisque tous les musulmans sont des terroristes ?
Ainsi interpellés, les responsables de la Poste n’ont pas encore pris de décision. Ils attendent probablement que le Saint-Esprit les éclaire…
