Pour les banques tchadiennes, le plus dur est passé

Les banques se remettent des retombées de la révolution libyenne. Notamment grâce à l’État, qui occupe une (trop) grande place dans le secteur, à la fois comme actionnaire et comme client.

Les autorités ont suivi de près la situation de la Banque commerciale du Chari, détenue par N’Djamena et Tripoli. © Vincent Fournier/JA

Les autorités ont suivi de près la situation de la Banque commerciale du Chari, détenue par N’Djamena et Tripoli. © Vincent Fournier/JA

Publié le 23 mars 2013 Lecture : 3 minutes.

Après une année 2011 difficile, l’année 2012 a été qualifiée de « neutre » par l’un des principaux banquiers de la place. Sur les huit établissements présents sur le marché tchadien, les deux comptant une participation libyenne – la Banque commerciale du Chari (BCC) et la Banque sahélo-saharienne pour l’investissement et le commerce (BSCIC) – ont finalement peu souffert de l’incertitude née de la révolution. Trois banques privées (le groupe panafricain Ecobank, le togolais Orabank et le français Société générale) dominent le secteur, avec plus de la moitié des parts de marché en termes de dépôts. Ecobank, arrivé en 2006 au Tchad, se taille la part du lion avec un peu plus du quart des quelque 550 milliards de F CFA (838 millions d’euros) de dépôts recueillis à la fin de 2012. Trois banques suivent de très près : Orabank Tchad (19 % des dépôts), Société générale Tchad (17 %) et Commercial Bank Tchad (16 %).

L’enjeu consiste toujours à faire progresser le taux de bancarisation, qui n’est actuellement que de 5 %. Parmi les outils généralement efficaces dans ce domaine, le mobile banking (ensemble de services bancaires accessibles via le téléphone mobile) reste balbutiant. Un projet mené conjointement par Orabank et l’opérateur de télécommunications Tigo a été lancé fin 2012. Ecobank, en partenariat avec l’opérateur Airtel, avait, lui, investi le créneau quelques mois plus tôt, en juin. La banque panafricaine, qui veut poursuivre son extension géographique, à l’est et au centre du pays, a également décidé de réduire autant que possible les contraintes liées à l’ouverture d’un compte. Elle veut en outre développer l’usage des cartes bancaires chez sa clientèle en installant des terminaux de paiement électronique chez les commerçants et les grossistes.

la suite après cette publicité

L’enjeu est de faire progresser le taux de bancarisation, qui n’est que de 5%.

Informel

Mais l’un des traits caractéristiques du secteur reste la prépondérance de l’État. Ainsi, Kerim Mahamat Ali, directeur de la filiale locale d’Ecobank, juge que le marché bancaire reste largement dominé par le secteur public, « grand pourvoyeur de ressources, de transactions et d’effet induits à travers ses investissements dans le BTP, les mines et les services ». Il regrette la taille relativement modeste du tissu entrepreneurial, incapable de soutenir un réseau bancaire plus solide à long terme. Mawata Wakag-Gomon, secrétaire général de l’Association professionnelle des établissements de crédit (Apec Tchad), incrimine quant à lui l’économie informelle, très prospère et qui recourt très peu au financement bancaire. Il juge que la « base économique du pays demeure fragile ».

Cliquez sur l'image.Pas de Privatisation

la suite après cette publicité

L’importance de l’État se ressent également dans sa participation au capital de trois des huit banques de la place. Quatre même à titre temporaire, les autorités ayant repris, dans le cadre d’un portage avec un engagement de cession, une part du capital de la Commercial Bank Tchad (CBT), ancienne propriété de l’homme d’affaires camerounais Yves-Michel Fotso. Mais ce dossier semble au point mort. Et la privatisation des trois établissements publics n’est apparemment pas envisagée. L’État a en outre suivi de près la situation des banques à capitaux libyens et soutenu leur trésorerie pour éviter qu’elles ne disparaissent. « Leur existence semble donc préservée pour l’instant, mais tout dépend des décisions de la nouvelle administration libyenne », confie un banquier qui préfère garder l’anonymat.

À en croire les observateurs, les perspectives du secteur pour 2013 sont bonnes. « Le plus dur est passé : l’année 2012 a été marquée par un ralentissement des engagements publics et un effort de maîtrise de l’exécution du budget de l’État, explique Kerim Mahamat Ali. Il y a eu beaucoup d’avancées en 2012, notamment d’un point de vue réglementaire et dans l’environnement des affaires. En décembre 2012, la Cemac [Communauté économique et monétaire de l’Afrique centrale, NDLR] a adopté un règlement qui protège les avoirs des banques. De plus, les perspectives macroéconomiques s’ouvrent. Le budget 2013 est très orienté vers les infrastructures [de transport, essentiellement], sans compter que les récoltes de coton et de gomme arabique s’annoncent bonnes. » Autre événement positif : l’entrée en production, en 2011, de la raffinerie de N’Djamena, qui limite les importations de carburants et donc les sorties de devises du pays, devrait permettre d’augmenter la base de dépôt à un rythme encore plus rapide que les 20 % annuels observés jusqu’alors… 

la suite après cette publicité

L'éco du jour.

Chaque jour, recevez par e-mail l'essentiel de l'actualité économique.

Image

Contenus partenaires