Laurence Parisot en bonne voie pour jouer les prolongations
La patronne des patrons français achève son second mandat à la tête du Medef. Mais elle souhaite poursuivre sa mission au-delà de cette limite.Elle vient de remporter la première manche d’un match en trois sets qui pourrait la conduire à rempiler pour la troisième fois à la tête du Medef.
« Ce n’est plus Poutine, c’est Gbagbo ! » s’est exclamé un membre de l’assemblée générale du Mouvement des entreprises de France (Medef), en apprenant que sa présidente, la « patronne des patrons » français, avait envoyé un e-mail le 12 janvier à 1 h 35 du matin pour demander aux membres de son conseil exécutif l’étude d’une modification des statuts de l’institution.
But avoué : prolonger son mandat au-delà de son terme, pratique souvent rencontrée chez les chefs d’État pas très démocrates, tels MM. Ben Ali, Biya, Compaoré, Déby… Quelle mouche a piqué Laurence (Parisot) pour qu’elle s’accroche à sa présidence comme Laurent (Gbagbo), l’ancien leader ivoirien ? Les textes qui régissent le Medef sont clairs : la charge de président peut être assumée par la même personne pendant deux mandats seulement, le premier de cinq ans, le second de trois. Élue en 2005 et réélue en 2010, Laurence Parisot devrait quitter son poste le 30 juin.
Tempête
Pour justifier sa demande, elle dit son envie de servir son pays et les entreprises, compte tenu de la tempête traversée par une France « qui recule ». Et d’énumérer les maux français : un déficit cumulé des régimes de retraite qui atteindra 200 milliards d’euros en 2020, une assurance-chômage dans le rouge de 18 milliards d’euros fin 2013 et un nombre de personnes en recherche d’emploi catastrophique…
Certains avancent d’autres explications. Il y a ceux qui pensent qu’elle veut éviter que le Medef ne bascule à gauche. Par exemple avec Frédéric Saint-Geours, président de l’Union des industries et métiers de la métallurgie (UIMM) et ancien directeur de cabinet d’Henri Emmanuelli (secrétaire d’État socialiste au Budget dans le gouvernement de Laurent Fabius). Moins charitables, d’autres prétendent qu’elle « ne sait pas quoi faire après » : retourner dans son entreprise, l’institut de sondages Ifop, lui semblant bien morne après huit ans passés à la tête du Medef.
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Ses partisans ? Ceux qui s’affichent à ses côtés ne sont pas légion : Jean-Louis Schilansky (Union française des industries pétrolières) et Guillaume Cairou (Club des entrepreneurs). En coulisses, on dit que Michel Pébereau (BNP Paribas), Christophe de Margerie (Total), Jean-Louis Beffa (ex-Saint-Gobain) et Gérard Mestrallet (GDF Suez) s’activent en sa faveur.
Ses challengeurs ? Pierre Gattaz, président du Groupe des fédérations industrielles (GFI), Geoffroy Roux de Bézieux, président de Virgin Mobile France, Thibault Lanxade, PDG d’Aqoba, Jean-Claude Volot, patron du groupe Dedienne, Hervé Lambel, gérant de la société de production HLDC, et – peut-être – Frédéric Saint-Geours, précité. Ils accusent la présidente de ne pas jouer collectif. « Il n’est pas correct de changer les statuts si près des élections », clament-ils. « On ne divise pas le patronat dans une période aussi troublée. »
Putsch
Le Medef risque de vivre une période successorale aussi compliquée que celle que vient de connaître son adversaire, la Confédération générale du travail (CGT) ! Son comité d’éthique a émis des réserves sur la proposition Parisot, et cinq de ses membres ont démissionné, dont son président. Mais la patronne des patrons a remporté une première manche le 18 mars. Le conseil exécutif (45 membres) a statué positivement sur une modification des statuts. Le président du comité des statuts de l’organisation patronale, Georges Drouin, a confirmé qu’il était favorable à un changement des règles internes « applicable dès les prochaines élections », en juillet prochain.
Ces propositions doivent maintenant être validées par le comité exécutif du Medef, qui se réunira le 28 mars prochain. Ce sera le deuxième obstacle pour Laurence Parisot, qui doit obtenir la majorité des voix des 45 membres de ce comité.
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