Bons baisers de Tripoli
Publié le 20 janvier 2008 Lecture : 2 minutes.
Culot, inconscience ou mépris ? Les trois sans doute. Le jour même, 16 janvier, où Mouammar Kadhafi, auto-invité au sommet de la Cedeao, faisait son entrée triomphale à Ouagadougou (voir pp. 14 à 16 le reportage de notre envoyé spécial), les autorités libyennes annonçaient à Tripoli le « regroupement et rapatriement immédiat de tous les immigrés clandestins ». Soit, au bas mot, un million de Subsahariens, mais aussi de Maghrébins et d’Égyptiens en situation irrégulière. En attendant l’affrètement des avions-cargos dans les soutes desquels ils seront expulsés, les rafles ont aussitôt commencé et les bulldozers sont entrés en action pour raser leurs abris de fortune. Dans cette besogne, la police peut compter sur le soutien actif des bons citoyens de la Jamahiriya : à leurs yeux, les immigrés sont responsables de l’insécurité, des maladies, du chômage et de toutes les plaies dont souffre leur pays. Elle peut aussi compter sur le talent d’un « Guide » expert en schizophrénie, prophète halluciné du panafricanisme sans frontières, qui n’a pas hésité à faire établir en 2007 l’obligation de visas pour tous les ressortissants d’Afrique noire. Elle peut enfin compter sur le silence et la compréhension de l’Europe et des pays d’origine des clandestins.
Car enfin, qui oserait reprocher à la Libye de faire ce qu’elle fait ? La France, avec ses quotas d’expulsés ? L’Union européenne, qui repousse au large les damnés de la mer (deux mille noyés en 2007 au large des côtes italiennes) ? Le Maroc, qui a balayé ses propres clandestins en 2005 ? La Guinée équatoriale, qui a fait de même il y a deux mois avec les Camerounais ? L’Afrique du Sud, avec ses Zimbabwéens ? Même le Mozambique s’y est mis, en affrétant mi-janvier un charter de Maliens Seule différence entre Kadhafi et ses voisins de la rive nord de la Méditerranée : la manière. Brutalités, vols et appels à la délation d’un côté, violences feutrées et centres de rétention aseptisés de l’autre. Un peu de patience : la Libye, nous assure-t-on, est en voie de réhabilitation dans le concert des nations dites civilisées
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