La paille et la poutre

Publié le 19 février 2006 Lecture : 2 minutes.

Quand, s’adressant à ses disciples, le Christ recommandait à chacun d’« enlever la poutre qui est dans son il avant de vouloir enlever la paille dans l’il du prochain », il s’agissait bien sûr d’un appel à la conscience personnelle, pour une relation équitable avec autrui. Mais on pourrait, me semble-t-il, s’inspirer de cet enseignement évangélique pour les relations entre les partis politiques, entre les peuples et entre les religions. On pourrait aussi y trouver un appel à plus d’équité et de sérénité, face à la polémique qu’a suscitée la publication, dans certains journaux, de caricatures agressives contre le Prophète de l’islam.
Ceux qui, dans les pays arabes et musulmans, critiquent non seulement les médias de « l’Occident », mais parfois ses gouvernements, devraient se demander si, dans leurs pays, les libertés sont suffisamment respectées et assurées pour tous. Ils devraient aussi comprendre que la meilleure façon de répondre à ceux qui critiquent injustement l’islam, ce n’est pas de recourir à la violence mais c’est d’être vraiment fidèles aux valeurs éthiques et spirituelles auxquelles le message coranique appelle les croyants.
Enfin, tous ceux qui, à juste titre, soutiennent le peuple palestinien et dénoncent l’injustice qui lui est faite depuis si longtemps devraient absolument éviter de confondre la politique d’un État avec l’ensemble des juifs ou avec la religion juive. Mais l’Occident, lui aussi, devrait enlever la « poutre » qui est dans son il avant de vouloir « faire la leçon » au reste du monde. La liberté est, certes, une valeur fondamentale, et nous avons raison d’y être attachés. Encore faut-il qu’elle aille de pair avec le sens de la responsabilité et avec le respect envers autrui, ce respect devant exister tout particulièrement envers les convictions religieuses de tous les croyants. Or il faut bien reconnaître qu’à cet égard, en Europe et aux États-Unis, les médias franchissent parfois la ligne rouge, au risque de susciter dans une partie de la population, en particulier chez les jeunes, une attitude stérile faite d’agressivité et de dérision.
En outre, tout en proclamant leur attachement aux « droits de l’homme » et aux résolutions de l’ONU, les États occidentaux ne mettent pas toujours en pratique, dans les relations internationales, les beaux principes dont ils se réclament. Quand on voit l’incapacité des États-Unis et de l’Union européenne à faire appliquer le droit international en Terre sainte, comment s’étonner que les Arabes – tant chrétiens que musulmans – dénoncent ce qu’ils considèrent, non sans raison, comme une politique de « deux poids deux mesures » ?
Dans un tel contexte, il est heureux que des voix s’élèvent pour appeler les uns et les autres non seulement à la modération, mais à l’écoute mutuelle et à la coopération. À cet égard, les appels lancés ces dernières semaines par le Saint-Siège, par l’Organisation de la conférence islamique (OCI) et par la Ligue des États arabes sont une raison d’espérer pour tous ceux qui croient possible et nécessaire un véritable dialogue entre les croyants des diverses religions et aussi entre croyants et incroyants.

Michel Lelong, père blanc, est cofondateur du Groupe d’amitié islamo-chrétienne.

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