Sida : le combat ne fait que commencer

Publié le 18 décembre 2005 Lecture : 5 minutes.

Lorsque j’ai quitté la Maison Blanche en 2002, il y avait dans le monde 33 millions de personnes vivant avec le VIH-sida, dont 95 % dans les pays en développement. Depuis, malgré les efforts considérables déployés au plan international, le total a dépassé les 40 millions, bien que, dans l’intervalle, 15 millions d’hommes, de femmes et d’enfants aient succombé à la maladie. En dépit de l’ampleur de la crise en Afrique et dans les Caraïbes, du risque d’explosion des infections en Chine, en Inde et en Europe de l’Est, et du fait que le sida tue aujourd’hui 8 500 personnes par jour, nous nous devons de redoubler d’efforts pour tenter de renverser la tendance.

J’ai atteint un stade de ma vie où ce qui m’importe le plus est qu’aucun enfant ni aucun adolescent ne meure prématurément de maladies guérissables. C’est cette détermination qui motive largement l’activité de ma fondation, en particulier la Clinton HIV-Aids Initiative (CHAI). Chaque fois que je rencontre un enfant au Lesotho, une mère au coeur de la Chine rurale ou un adolescent au Kenya – qui, hier promis à une mort inéluctable, ont tous désormais une chance de vivre à condition d’avoir accès aux médicaments antirétroviraux -, je sais que nous pouvons gagner avec de la volonté, des ressources et des efforts organisés et cohérents.
Lors de la Journée mondiale de lutte contre le sida 2005, il y a quand même eu de bonnes nouvelles. Au début de 2003, en Afrique, les antirétroviraux n’étaient accessibles qu’à une personne sur les cent qui en auraient eu besoin. Aujourd’hui, grâce aux ministères de la Santé, aux médecins, aux infirmiers, aux personnels de santé et à tous ceux qui leur apportent leur aide (le Fonds mondial, le programme sida de l’administration Bush, la Fondation Gates, la CHAI et bien d’autres), plus de cinq cent mille Africains vivant avec le VIH ont accès aux médicaments : c’est dix fois plus. La plus grande contribution de ma fondation a été d’obtenir que le prix des médicaments et des dépistages passe de 500 dollars (425 euros) ou davantage par an à 150 dollars.
Bien que l’ambitieux objectif de l’ONU – qui était que 3 millions de personnes bénéficient de soins dès la fin de cette année – n’ait pas été atteint, plus d’un million de malades sont aujourd’hui traités, ce qui est un progrès considérable. Mais il en reste encore 5 millions qui ne le sont pas, dont 700 000 enfants.

la suite après cette publicité

D’abord, il faut construire des centres de soins, renforcer les systèmes de distribution, recruter et former du personnel de santé. Ce ne sera possible qu’avec davantage d’argent, et c’est pourquoi il est important que le Fonds mondial de lutte contre le sida, la tuberculose et le paludisme reçoive l’an prochain une nouvelle série de dons. Dans ce but, la CHAI élargit à l’Éthiopie, à l’Ukraine et au Vietnam le soutien technique qu’elle apporte déjà à dix-sept pays d’Afrique, d’Asie et des Caraïbes. Nous élargissons aussi les initiatives pédiatriques en milieu rural que nous avons lancées en avril dernier et qui sont dépassées par la rapide évolution des traitements. Au début de l’année, 10 000 enfants seulement (en dehors du Brésil et de la Thaïlande) bénéficiaient d’un traitement. Ma fondation et ses partenaires vont réussir à doubler ce nombre cette année. Et ils s’engagent à prendre en charge 50 000 enfants l’an prochain.

En second lieu, il faut que le coût des soins reste abordable. Je suis très heureux que 25 % des personnes aujourd’hui en traitement en Afrique, en Asie et aux Caraïbes bénéficient de la réduction des prix des médicaments et du dépistage que ma fondation a négociée. Cependant, plus elles sont nombreuses et plus la facture s’alourdit pour les pays et les donateurs. Le fait que le prix d’un diagnostic, par exemple, soit relativement bas est très important lorsqu’il s’agit de tester plusieurs dizaines de millions de gens. En revanche, le coût élevé des traitements dits de seconde ligne – qui sont dix fois plus chers que les médicaments de première ligne -, peut nous empêcher de poursuivre le traitement.

Troisièmement, il faut redoubler d’efforts pour prévenir les nouvelles infections par le VIH. Seule la prévention peut mettre fin à la pandémie. Bien entendu, il n’est pas question de renoncer au vaccin comme solution à long terme, ni au microbicide en attendant, mais il ne faut surtout pas oublier qu’il est possible de se protéger du sida grâce à des comportements appropriés. La grande majorité des sujets à risque est encore mal informée. Trop de jeunes gens sont encore contaminés par des seringues souillées. Trop de femmes sont infectées lors de rapports sexuels qui ne sont pas volontaires. Il faut leur donner la possibilité de se défendre et apprendre aux adultes à modifier des comportements qui font courir des risques aux enfants. Les premières dames d’Afrique font campagne pour que « tous les enfants soient traités comme s’ils étaient les nôtres » et invitent les adultes à s’impliquer collectivement dans cette opération.

Pour des Occidentaux, il est tentant de penser que seuls les riches et les puissants sont capables de relever de tels défis. Le G8 distribue des milliards de dollars d’aide. Les fondations caritatives et les philanthropes en octroient, pour leur part, des millions. Mais chacun a un rôle à jouer. À Banda Aceh, en Indonésie, j’ai observé avec quelle efficacité de simples bénévoles ont réussi à venir en aide aux victimes du tsunami. Ils ont envoyé des couvertures et de la nourriture, donné de l’argent et du temps pour construire des maisons ou soigner les malades. Des volontaires ont également joué un rôle important après les ouragans qui ont dévasté les États-Unis ou après le récent tremblement de terre au Cachemire. Dans toutes ces catastrophes naturelles, la générosité individuelle a permis de sauver des milliers de vies. Elle peut de même changer bien des choses, pour des millions de personnes, dans la lutte contre le sida, surtout en matière d’éducation, de prévention et de soins dans les régions reculées.

la suite après cette publicité

Toutes les voix comptent. Et aussi tous les dollars, toutes les heures dont vous pourrez faire don. Votre générosité soutient le travail inlassable de ceux dont les efforts pour combattre le sida sont couronnés de succès. Il y a encore énormément à faire, mais nous marquons des points. Ensemble, nous pouvons triompher de cette tragédie humaine.

La Matinale.

Chaque matin, recevez les 10 informations clés de l’actualité africaine.

Image

Contenus partenaires