Pas de pitié pour les « corrompus » !

Publié le 18 décembre 2005 Lecture : 2 minutes.

Dans une diatribe publiée le 9 décembre, The Wall Street Journal s’en prend à l’économiste américain Jeffrey Sachs, chef de file de la campagne mondiale ayant abouti à l’adoption par les Nations unies d’un programme de doublement de l’aide et d’effacement de la dette. Le pire, aux yeux du quotidien américain, est que Jeffrey Sachs est parvenu à convaincre les chefs d’État du G8 – y compris George W. Bush – de financer ce programme à l’issue du sommet de Gleneagles (Écosse, 3 juillet 2005). À cause de lui, se lamente le journal conservateur, George W. Bush a passé plus de temps à parler de la pauvreté en Afrique que des autres affaires mondiales ! Plus grave : l’argent du contribuable américain va servir à financer une partie (20 %) de cet effort estimé à 1 600 milliards de dollars sur dix ans (2005-2015).
Pour l’auteur anonyme de ce pamphlet, le travail entrepris par Jeffrey Sachs depuis cinq ans est malvenu. Les pays africains sont tous corrompus et ne méritent pas qu’on leur vienne en aide tant que les dictateurs et les clans qui les dirigent demeureront en place… Président de l’Institut de la Terre (Université de Columbia), Jeffrey Sachs a publié, en mars dernier, un remarquable ouvrage sur la pauvreté dans le monde (The End of Poverty, éd. Penguin, 398 pages). Ce livre, qui a fait la une du magazine américain Time (14 mars 2005), propose des moyens nouveaux pour éradiquer de la planète l’« extrême pauvreté » d’ici à l’an 2025. Celle-ci touche 1,1 milliard de personnes (vivant avec moins de 1 dollar par jour) dont le tiers se trouve en Afrique. Ce livre a eu le mérite d’éveiller les consciences, de favoriser une relance de l’aide solidement liée à la bonne gouvernance. Tous les garde-fous ont été prévus par les pays du G8, la Banque mondiale et le FMI. Fini le laxisme d’antan : le moindre dollar sera alloué avec une infinie précaution.
Faux ! rétorque le Wall Street Journal, qui s’appuie sur une étude publiée par les détracteurs de Sachs, en particulier Adam Lerrick (université Carnegie Mellon), soutenu par un sénateur ultraconservateur, Jim Saxton. Avant d’aider les pauvres, il faut, disent-ils, éliminer la corruption. Et contrairement à la liste de Sachs (voir page 73), les pays africains sont tous, sans exception, corrompus. Inutile donc de leur donner plus d’argent pour gonfler davantage leurs comptes en banque offshore. Selon Lerrick, ces fonds volés représenteraient 500 milliards de dollars… Pour lui, l’Afrique est le dernier endroit à secourir !

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