Maroc : Risma affiche des pertes historiques
En dépit de performances commerciales supérieures à la moyenne nationale, le groupe hôtelier marocain a perdu en 2012 près de 200 millions de dirhams. Il entend désormais se recentrer sur sa gamme économique.
Risma a publié le 27 février ses résultats financiers pour 2012. Son chiffre d’affaires a atteint 1,295 milliard de dirhams (116 millions d’euros), en quasi-stagnation par rapport à 2011. Le segment haut de gamme (Sofitel) a progressé de 19 %, le milieu de gamme (Novotel, Suite Novotel, Mercure, Coralia, Pullman) de 3 %, tandis que la branche économique et très économique (Ibis et Ibis Budget) restait stable. Même si le taux d’occupation moyen des hôtels de Risma a atteint 56 %, contre une moyenne de 40 % au niveau national, la filiale locale du français Accor (qui en détient 33,2 %) a enregistré sa perte la plus élevée depuis ses débuts en 1993 : un trou de 199 millions de dirhams, contre un bénéfice de 14,8 millions en 2011. « Nous avons bien résisté par rapport à la moyenne du secteur. Les pertes de 2012 seront bientôt un mauvais souvenir. Nos prévisions pour 2013 sont encourageantes », tempère Marc Thépot, vice-président du directoire de Risma.
Coûts
Les raisons de cette performance médiocre ne sont pas un mystère. En 2012, Risma a ouvert cinq hôtels, pour un total de plus de 800 chambres. Avec un impact négatif immédiat sur ses profits. « Les coûts liés aux cinq ouvertures d’hôtels ne sont pas amortissables comptablement et pèsent ainsi directement sur nos résultats financiers 2012, explique Marc Thépot. Mais ces pertes sont en réalité des investissements. » Le prestigieux Sofitel Casablanca Tour Blanche, ouvert en juillet 2012, a coûté 500 millions de dirhams. « Les nouveaux hôtels ont ouvert tardivement en 2012 et n’ont pas pu bénéficier d’une année d’exploitation complète, mais cela ne sera pas le cas en 2013 », affirme Marc Thépot. Ils devraient donc contribuer positivement aux résultats futurs de Risma.
L’autre raison des difficultés financières de Risma est comptable : la société s’est en effet désengagée de trois hôtels (le Coralia Club Agadir, le Mercure Ouarzazate et l’Ibis Essaouira), ce qui a engendré une perte de 75 millions de dirhams, dont 48 millions de frais liés notamment aux ruptures anticipées des contrats de location du Coralia et du Mercure. « Les frais de restructuration liés à la sortie de certains hôtels structurellement déficitaires de notre périmètre d’exploitation ne se retrouveront pas dans nos résultats 2013 », assure Marc Thépot. Enfin, la participation dans la station balnéaire d’Essaouira-Mogador a provoqué une perte de 62 millions de dirhams.
En Bourse, ces nouvelles n’ont guère arrangé une situation déjà difficile : le cours de Risma a été divisé par trois depuis mai 2010. Pour sortir de l’ornière malgré un climat touristique difficile, plusieurs pistes sont envisagées. Parmi celles-ci, la réduction de la dépendance aux intermédiaires (agences de voyages et tour-opérateurs), avec lesquels les marges sont plus faibles en raison de tarifs de gros inférieurs aux prix publics affichés. La partie est d’ores et déjà quasiment gagnée : les personnes individuelles constituent 85 % des clients de Risma. Autre piste : la diversification géographique de la clientèle. Pour pallier la baisse du nombre de touristes européens, la direction de Risma entend profiter des relais d’Accor auprès de la clientèle marocaine et africaine.
Prudence
Mais elle compte surtout sur un recentrage stratégique. « Le développement de la marque Sofitel n’est plus à l’ordre du jour, car nous avons pris nos positions dans les endroits stratégiques, assure Marc Thépot. Nous souhaitons désormais nous recentrer sur la gamme économique et très économique avec nos marques Ibis et Ibis Budget. » Risma prévoit d’ouvrir huit Ibis Budget en joint-venture avec le groupe marocain Akwa (propriété du ministre Aziz Akhannouch) d’ici à 2014. Son objectif pour les hôtels Ibis est d’en avoir vingt-quatre d’ici à 2020, contre seize aujourd’hui.
Actionnaire de Risma à hauteur de 3,55 %, BMCE Capital estime que « le recentrage à venir de Risma sur la gamme économique et très économique est un choix d’investissement intelligent, car ce segment est un amortisseur en temps de crise. De plus, les investissements sont moins lourds et la rentabilité plus rapide que dans le haut de gamme ». En effet, le taux de remplissage de ces hôtels, qui ciblent une clientèle de cadres moyens et de patrons de PME, est plus élevé que dans le haut de gamme : 62 % mi-2012, contre 57 %. Et ce pour une marge opérationnelle plus élevée de moitié. À la clé, des entrées de trésorerie relativement régulières et positives, au lieu de la volatilité plus élevée du segment haut de gamme, constitué d’hommes d’affaires et de touristes. Les apports plus faibles nécessaires pour développer ces hôtels limitent également l’endettement du groupe, qui s’est envolé depuis quelques années. Ce ne sera pas suffisant pour espérer un retour au bénéfice cette année. Mais les actionnaires peuvent commencer à se réjouir : un dividende pourrait être versé en 2015 pour le compte de l’exercice 2014.
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