Yacouba Barry : « On ne doit pas raser les quartiers précaires. On doit les équiper »
Mieux gérer le développement urbain et résoudre la crise du logement sont les deux chantiers prioritaires du ministre de l’Habitat et de l’Urbanisme.
Secrétaire général du gouvernement jusqu’à sa nomination à la tête du ministère de l’Habitat et de l’Urbanisme, Yacouba Barry, 53 ans, y a retrouvé des dossiers qu’il connaît bien, puisqu’il est ingénieur géomètre. Il a notamment été directeur national du cadastre et de la maîtrise d’ouvrage du barrage de Ziga. Membre du secrétariat exécutif national du Congrès pour la démocratie et le progrès (CDP), le ministre a été élu député de la province du Yatenga (Nord) en décembre 2012. Reconduit dans ses fonctions lors du remaniement du 2 janvier dernier, il dresse un bilan, à mi-parcours, des deux chantiers prioritaires de son portefeuille : la gestion et l’aménagement urbains d’une part, la politique du logement d’autre part.
Jeune Afrique : Quelles sont vos priorités de développement urbain ?
Yacouba Barry : Notre premier objectif est de maîtriser davantage l’aménagement en renforçant les capacités de planification et de gestion urbaines, via des schémas directeurs d’aménagement et d’urbanisme (SDAU). Ils permettent d’assurer un meilleur suivi du développement des villes. Par ailleurs, nous voulons que le plus grand nombre possible de gens accède à un logement décent. Soit à travers la politique d’édification des cités du ministère, soit par l’autoconstruction, les Burkinabè aspirant de plus en plus à devenir propriétaires.
53 ans
1989-1993 : directeur national du cadastre
2006-2010 : responsable de la maîtrise d’ouvrage sur le barrage de Ziga
2010-2011 : secrétaire général du gouvernement
2011 : ministre de l’Habitat et de l’Urbanisme
2012 : député du Yatenga
Où en sont les 10 000 logements sociaux promis par le gouvernement ? Suffiront-ils à répondre aux besoins ?
Ce programme ne va pas répondre à toute la demande, il doit doper la production de logements sociaux. Rien qu’à Ouagadougou, il faudrait 10 000 logements par an environ, 8 000 à Bobo-Dioulasso et, dans les autres villes, entre 1 000 et 2 000.
Qu’est-ce qui a été entrepris ?
En 2012, nous avons commencé à bâtir 1 500 logements à Bassinko [à 20 km de la capitale, NDLR] avec le Centre de gestion des cités [Cegeci]. Et plus de 970 ont été réalisés au cours de l’année. Par ailleurs, nous avons un projet de 3 000 unités avec le Qatar. Enfin à Dori [Nord-Est], où sera organisée la fête nationale en 2013, nous allons construire une cité.
Où en est le schéma directeur d’aménagement du Grand Ouaga ?
Il ira au-delà de la commune de Ouagadougou pour intégrer toute l’agglomération. Il prévoit la mise en place de zones d’activité spécialisées, pourvues des services sociaux élémentaires. Les différents rapports d’étape et le rapport général ont été validés. Reste à approuver le schéma du Grand Ouaga en Conseil des ministres, une fois qu’il aura été harmonisé avec le schéma national d’aménagement du territoire, en cours d’élaboration.
L’objectif est de restructurer les zones d’habitat informel et d’y amener les services essentiels : eau, électricité, écoles…
La capitale continue de s’étendre, pas toujours de façon rationnelle. Comment encadrer ce phénomène ?
Ouagadougou s’étend, évidemment. Les gens aspirent à y vivre, puisque c’est là que se déroulent la plupart des activités. Le bien-être attire. Mais n’ayant pas les moyens de se loger dans la capitale, ils s’installent en banlieue et créent des zones d’habitat spontané. Pour y remédier, notre Programme participatif d’amélioration des bidonvilles [PPAB] devra servir de modèle : il doit revoir l’organisation spatiale de ces zones d’habitat précaire en les restructurant et, surtout, en les équipant des services de base – notamment les réseaux d’assainissement, d’eau potable et d’électricité, mais aussi l’école. La mesure radicale serait de raser ces zones non loties. Mais il est difficile de distinguer, parmi les habitants, celui qui a un réel besoin de logement et ne peut faire autrement de celui qui dispose par ailleurs d’un terrain, sur lequel il spécule. D’où le projet d’instaurer des taxes sur les propriétés non bâties. Je suis convaincu que recenser les terrains vides à Ouagadougou pourrait régler le problème.
Pourquoi la zone d’activité commerciale et administrative (Zaca) a-t-elle pris tant de retard ?
Le projet Zaca a de grandes ambitions, mais son taux de réalisation reste timide pour le moment : sur 300 parcelles commerciales vendues, 70 seulement sont en construction. Certains de ses opérateurs sont présents sur d’autres chantiers en parallèle, comme celui de la zone d’activités diverses [ZAD], il leur est donc difficile de tout mener de front. Ils nous demandent de faire des efforts pour les accompagner, par exemple en leur accordant des exonérations [notamment sur les matériaux de construction, l’embauche…]. Nous travaillons sur ces questions et réfléchissons à des mesures incitatives.
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