Ambitions ghanéennes

Publié le 18 juin 2006 Lecture : 2 minutes.

Le Ghana a du cacao à revendre. Deuxième producteur mondial derrière la Côte d’Ivoire, l’ancienne « Gold Coast », dans le golfe de Guinée, ne transforme que 20 % des fèves que récoltent chaque année 800 000 familles de cultivateurs. Le reste de la production (d’un total de 586 000 tonnes en 2004-2005) s’en va par cargo vers l’Europe, les États-Unis mais aussi le Moyen-Orient dans de gros sacs de jute achetés au Pakistan, en Inde ou au Bangladesh. Des fèves brutes pas même décortiquées qui, dans les usines occidentales, se transformeront en tablettes de chocolat, en beurre, en poudre de cacao à l’arôme réputé comme l’un des meilleurs au monde.
Pour le Ghana, le manque à gagner est considérable. En 2005, une tonne de cacao ghanéen transformé se vendait 2 097 dollars à l’exportation, contre 1 525 dollars pour une tonne brute. En clair, le Ghana pourrait empocher un tiers de devises supplémentaires s’il disposait d’une structure industrielle à même de traiter sa production. Il pourrait aussi évidemment soustraire une série de coûts : main-d’uvre, fonctionnement des usines, recherche et développement
Le pays ne pouvait être que gagnant. « Transformer les récoltes brutes permet de se protéger contre les variations des cours », assure un spécialiste. Comme pour toute matière première, le prix du cacao, coté à Londres et à New York (les deux marchés principaux), est influencé par l’évolution de l’offre et de la demande. Baisse en cas de surproduction, hausse dans le cas contraire : pour anticiper les recettes et éviter les déconvenues, rien de tel que la transformation. Par manque de ressources financières et de main-d’uvre qualifiée, le Ghana n’a pas vraiment développé la filière en aval.
Sur les trois usines de transformation que compte le pays, deux appartiennent à des groupes étrangers : l’allemand Hosta et le suisse Barry Callebaut. Cocoa Processing Company (CPC), qui produit essentiellement de la liqueur, de la poudre, du beurre et du chocolat, est de son côté détenue à 75 % par le Cocobod, l’organisme public qui régule l’activité.
Bien conscient que les fèves pourraient rapporter beaucoup plus, le gouvernement a fixé un objectif : transformer 40 % de la production sur le territoire. Et le 10 novembre 2005, le président a inauguré une nouvelle ligne de transformation. Désormais, CPC peut traiter 55 000 tonnes, contre 25 000 auparavant. D’ici à la fin de 2006, la capacité de la première ligne doit passer de 25 000 à 35 000 tonnes. En un peu plus d’un an, CPC aura ainsi multiplié sa production par quatre. Son chiffre d’affaires devrait passer de 40 millions à 100 millions de dollars.
Apparemment, le programme inspire confiance aux investisseurs. D’après la mission économique française à Accra, les travaux ont notamment été financés par un prêt de 22 millions d’euros venant d’un consortium de banques emmené par la Barclays. CPC y a également contribué à hauteur de 1,4 million d’euros (sur fonds propres). Les ambitions de CPC sont partagées par Hosta et Barry Callebaut, qui envisagent également d’accroître leurs capacités de production dans le pays. Une dynamique qui fait des émules : selon la même source, deux multinationales américaines, Cargill et ADM, songent maintenant à s’implanter au Ghana. L’ère de la transformation du cacao a peut-être commencé.

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