Ce qu’endurent les victimes du ver de Guinée

Publié le 18 mars 2007 Lecture : 3 minutes.

Au Ghana, première étape de sa tournée dans quatre pays africains, l’ancien président américain Jimmy Carter a examiné où en était la campagne pour éradiquer le ver de Guinée. C’est un affreux parasite de près de 60 cm de long qui se développe d’abord dans le corps avant de s’en extraire par diverses parties, causant ainsi d’atroces douleurs. Carter a été bouleversé par les victimes qu’il a rencontrées. Parmi elles, une femme de 57 ans chez qui le ver de Guinée est ressorti par un sein. « Plusieurs vers étaient sortis d’autres endroits de son corps : de ses parties génitales, de ses jambes ainsi que de ses pieds, raconte Carter. En tout, ce sont quatre parasites qui sont sortis simultanément de son corps. J’ai vu de tout-petits enfants âgés de 3, 4 et 5 ans hurler sans discontinuer sous l’effet de la douleur. Je me suis alors mis à pleurer avec eux. »

Nous ne nous préoccupons des droits de l’homme que lorsque cela touche le droit de vote, la liberté d’expression ou de réunion. Mais un enfant devrait aussi avoir le droit de ne pas connaître d’horribles souffrances à cause d’un parasite dont on peut facilement se prémunir, celui de ne pas être aveugle à cause d’un manque de médicament qui coûte 1 dollar ou 2, celui de ne pas mourir pour une carence de moustiquaire à 5 dollars. Lorsqu’il était président, Jimmy Carter avait fait de la question des droits de l’homme une priorité. Aujourd’hui, il dit (et il a parfaitement raison) que nous avons trop tendance à limiter les droits de l’homme aux droits politiques et civiques, et qu’il faudrait aussi se battre pour que les enfants du monde entier aient le droit de mener une vie saine. Parce qu’il se bat contre la maladie du ver de Guinée depuis deux décennies, on a bon espoir que ce dernier soit éradiqué dans les cinq prochaines années. Ce sera alors la première maladie infantile à être éliminée depuis la variole en 1977.
C’est après avoir quitté la Maison Blanche que Carter s’est intéressé à des maladies comme le ver de Guinée, l’onchocercose (« cécité des rivières »), l’éléphantiasis, le trachome ou encore la schistosomiase. Bien qu’il existe des maladies causant des souffrances inimaginables, elles n’attirent que rarement l’attention de la communauté internationale. L’aide reste quasi nulle parce que les victimes sont pauvres et invisibles. Lorsque Carter avait rencontré Muhammad Zia ul-Haq, alors président du Pakistan, ce dernier n’avait jamais entendu parler du ver de Guinée et ignorait que la maladie sévissait dans son pays. Tout comme son ministre de la Santé. Mais le Pakistan a ensuite travaillé en étroite collaboration avec le Carter Center pour éliminer le parasite.
Les villages éthiopiens où s’est rendu dernièrement l’ex-président, bordés par des ruisseaux aux eaux rapides, ont des allures de carte postale avec leurs cases aux toits de chaume. Pourtant, ces ruisseaux sont le foyer de mouches noires dont les piqûres propagent le parasite qui cause l’onchocercose. « Vous ne pouvez avoir idée de la souffrance des gens atteints de ce mal, souligne Carter. Kemeru Befita, qui faisait sa lessive dans un ruisseau, m’a confié que deux de ses enfants avaient contracté la cécité des rivières. Après une visite sans succès chez le sorcier, elle les a emmenés dans un dispensaire où, grâce au programme de Carter, ils ont reçu des soins qui ont détruit les larves du parasite. Ce sont deux des 10 millions de personnes auxquelles le Carter Center a donné des médicaments l’année dernière, et leur a évité de perdre la vue.

la suite après cette publicité

New York Times et Jeune Afrique 2007

La Matinale.

Chaque matin, recevez les 10 informations clés de l’actualité africaine.

Image

Contenus partenaires