Pékin donne l’exemple, Washington fait la leçon

Publié le 17 décembre 2006 Lecture : 2 minutes.

Ces vingt-cinq dernières années, j’ai voyagé dans plus de cent pays, pour la plupart des pays en développement, dont dix-huit en Afrique. J’en ai conclu que lorsqu’il s’agit d’éradiquer la pauvreté, de venir en aide aux pauvres et aux marginalisés, le modèle chinois, si imparfait soit-il, s’est montré beaucoup plus efficace que ce qu’on pourrait appeler le modèle américain, tel que défini par le Fonds monétaire international (FMI), qui préconise un programme d’ajustement structurel pour l’Afrique subsaharienne ou une « thérapie de choc » pour la Russie.
Le modèle américain est largement inspiré par l’idéologie, avec l’accent sur une démocratisation généralisée. Peu soucieux des conditions locales, il traite l’Afrique subsaharienne ou d’autres pays moins développés comme des sociétés matures où les institutions occidentales vont automatiquement s’intégrer. Il a imposé la libéralisation avant qu’on ait installé des filets de sécurité ; la privatisation avant qu’on ait mis en place un cadre réglementaire ; et une démocratisation avant qu’on ait instauré une culture de tolérance politique et l’État de droit. Le résultat final a souvent été décourageant ou même catastrophique.
L’objectif primordial pour la plupart des pays en développement est d’éradiquer la pauvreté, source de conflits et de diverses formes d’extrémisme. Ce dont ils ont généralement besoin, ce n’est pas d’un gouvernement démocratique libéral, mais d’un bon gouvernement capable de combattre la pauvreté et d’apporter les services et une sécurité de base.
De plus, les conditions d’un gouvernement démocratique libéral – l’État de droit, une classe moyenne suffisamment étoffée, une population ayant un bon niveau d’instruction, une culture de tolérance politique – sont simplement absentes de la plupart des pays pauvres. Imposer une démocratisation prématurée fait courir le risque de conflits ethniques ou religieux. Tant que le modèle américain sera incapable de donner les résultats souhaités, comme on l’a vu à l’évidence à Haïti, aux Philippines et en Irak, le modèle chinois paraîtra préférable aux pays pauvres.
C’est peut-être l’attitude qui fait toute la différence. La Chine est jugée modeste, l’Amérique, arrogante. La Chine donne l’exemple, l’Amérique fait la leçon, impose des sanctions – quand elle n’envoie pas de missiles.

*Enseigne au Centre des études asiatiques de Genève et dans de grandes universités chinoises. Il a été l’interprète de Deng Xiaoping et d’autres dirigeants chinois dans les années 1980.

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