Le ministre et la journaliste

Publié le 16 octobre 2005 Lecture : 3 minutes.

En France, la vie privée des hommes politiques relève le plus souvent du secret… de Polichinelle. Tout le monde est au courant, mais les médias rechignent à s’en faire l’écho sans l’accord des intéressés. Et ce d’autant que la législation en la matière est stricte. Dernière illustration en date : les amours de Nicolas Sarkozy, l’impétueux ministre français de l’Intérieur et candidat à l’élection présidentielle de 2007. On le disait déprimé par le départ de son épouse Cécilia, à la fin de mai. Mais l’homme a de la ressource et semble avoir tourné la page. C’est le quotidien France Soir qui a vendu la mèche, dans son édition du 11 octobre : « Sarko » a une nouvelle compagne, dont l’indélicat journal livre l’identité. Il s’agit d’une journaliste politique du Figaro, spécialiste de la droite, et donc de l’UMP… Cette liaison avait fait depuis quelques semaines le tour des rédactions parisiennes et d’Internet. Seulement voilà, le « couple » menace de porter plainte pour atteinte à la vie privée. France Soir justifie son « scoop » par le fait que « la vie privée de Nicolas Sarkozy a un impact sur sa vie publique, un impact politique ».

L’affaire est révélatrice de l’habituel embarras des médias français quand il s’agit d’étaler la vie privée de leurs hommes et femmes publics. Et si le quotidien populaire a décidé de franchir le Rubicon, c’est que ses confrères, dont Le Parisien et France Inter, tournaient depuis quelques jours autour du pot, dévoilant moult détails sans jamais citer de nom. Les hebdomadaires Paris-Match et VSD se seraient même vu proposer des clichés du couple main dans la main sur un marché parisien du 16e arrondissement ou faisant ses courses dans un magasin d’électroménager proche de la Madeleine. Ce qui n’est peut-être pas le meilleur moyen de garder leur idylle secrète. Valeur estimée de ces photos : 80 000 euros. Échaudés par l’ire du tout-puissant ministre de l’Intérieur lorsque Paris-Match a publié, en août, des photos de Cécilia et de son nouvel amant, le communicant Richard Attias, aucun des deux ne les a encore publiées. Entre course à l’info et respect de la vie privée, chacun a choisi son camp. Même si, ces derniers temps, le traitement people des politiques français est devenu une mode (Villepin sortant rayonnant de l’eau, à La Baule, la socialiste Ségolène Royal se mettant en scène avec sa famille, etc.), il y a apparemment une limite à ne pas dépasser… Des limites très françaises, que les médias anglo-saxons, eux, ne se privent pas de franchir allègrement. Question de culture.

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L’affaire de coeur devient affaire d’État. Et Sarkozy, qui n’est pas forcément à un paradoxe près, de se plaindre : « On me traque, on me cible en permanence. » Il aimerait « pouvoir sortir le dimanche sans être suivi par les paparazzi ». C’est pourtant ce même Sarkozy qui convoque les médias à chaque sortie, exhibe son couple (le précédent) dans Paris-Match, accapare plateaux de télévision et colonnes de journaux. Il se trouve aujourd’hui confronté au revers de la médaille de l’exposition médiatique qu’il a tant souhaitée.

Autre paradoxe : sa nouvelle compagne est l’auteur d’un livre sur Jacques Chirac. Une hagiographie, plutôt. Petit florilège des qualités présumées du chef de l’État : « puissance de travail phénoménale », « subtil mélange d’exotisme et de rusticité », « humilité rare chez les puissants » ou « pragmatisme sans oeillère politique ». Et d’en conclure : « La France n’est pas à sa mesure, l’Occident non plus. » Pas sûr qu’elle soit sur la même longueur d’ondes que son nouveau compagnon… En tout cas, sa plume ne s’attaquera pas à Sarko : la belle a demandé à quitter le service politique du Figaro…

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