Irak : un retrait bénéfique pour tous

Publié le 16 septembre 2007 Lecture : 3 minutes.

Voilà quatre ans, aucun des voisins de l’Irak, à l’exception peut-être du Koweït, n’approuvait l’invasion. Tous considéraient l’occupation américano-britannique comme un facteur de déstabilisation, surtout si elle devait se prolonger. Tous craignent aujourd’hui que la guerre civile en Irak ne favorise l’extension du terrorisme et de la violence jusqu’à leurs propres territoires. L’Irak est déjà un sanctuaire pour les terroristes d’Al-Qaïda, qui ont mené des opérations contre la Jordanie, l’Arabie saoudite et le Liban, et pour les terroristes du PKK, qui attaquent la Turquie. Al-Qaïda menace à présent de s’en prendre à l’Iran, qui, en Irak, soutient les chiites contre ?la minorité sunnite.
Mais tous ces pays ne sauraient coopérer d’une manière constructive avec une armée d’occupation américaine. Surtout l’Iran, qui est le mieux placé pour constituer une force déterminante grâce à ses liens étroits avec la plupart des hommes politiques chiites et kurdes, à sa situation géographique et à ses relations économiques. La majorité des Iraniens souhaitent le retrait des troupes étrangères, de sorte que l’Irak ne constitue plus une base d’agression contre leur pays.

Les Saoudiens et les Jordaniens estiment qu’ils auraient du mal à s’engager tant qu’une échéance n’est pas fixée pour la fin de l’occupation. Que les Américains soient embourbés en Irak, et du coup moins menaçants, n’est pas pour déplaire aux Syriens. Quant aux Turcs, ils craignent qu’une prolongation de l’occupation américaine n’encourage le séparatisme kurde.
Ces calculs pourraient bien changer lorsqu’un calendrier aura été fixé pour le retrait total des troupes américaines et britanniques et la fin de l’occupation. C’est seulement à ce moment que chacun des voisins de l’Irak aura tout intérêt à se focaliser sur ?les problèmes de l’après-occupation, en particulier pour faire face aux menaces terroristes que l’instabilité ne manquera pas de susciter. Tous n’auront aucun mal à s’engager dès lors qu’il ne s’agira plus de soutenir une armée d’occupation. Aucun ne souhaite qu’il y ait un autre contrôle direct sur ?une partie ou sur la totalité de l’Irak. Tous voudront éviter le vide politique, qui bénéficierait à Al-Qaïda et à d’autres terroristes. Les États-Unis devraient profiter de ce laps de temps pour harmoniser ?ces intérêts multiples et assurer la stabilité à l’Irak.

la suite après cette publicité

Pour les Irakiens, il est impératif que les États-Unis disent clairement ce qui aurait dû l’être depuis le premier jour : nous n’envisageons aucune présence militaire permanente en Irak, ni base ni relation spéciale. Nous voulons un Irak pleinement indépendant et non un État vassal. Les États-Unis devraient renoncer à toute idée d’installation à long terme en Irak, comme ce fut le cas en Corée du Sud ou en Allemagne, au lendemain de la Seconde Guerre mondiale. Lorsque nous suggérons de tels projets, nous ne faisons que susciter plus de recrues pour Al-Qaïda, en particulier parmi les kamikazes étrangers. Le meilleur moyen d’isoler Al-Qaïda est de lui couper l’herbe sous le pied en mettant fin à l’occupation.

Il faudrait demander à l’ONU de mettre sur pied, avec les représentants des voisins de l’Irak, un groupe de contact qui aurait à traiter avec le gouvernement irakien de l’ensemble des problèmes en souffrance. Il serait utile, pour commencer, que tout le monde respecte l’intégrité territoriale de l’Irak, apporte son soutien – sans chercher à en tirer profit – au retrait pacifique et en bon ordre des forces étrangères et aide le gouvernement irakien à contrôler et à stabiliser son territoire en lui apportant un soutien global.
Il est important que les Américains puissent effectuer le retrait de leurs troupes en douceur et qu’ils laissent derrière eux une région stable et paisible.

* Samuel Berger a été conseiller à la Sécurité nationale américaine (1997-2000) ; Bruce Riedel est l’un des principaux membres du Saban Center for Middle East Policy, à la Brookings Institution.

La Matinale.

Chaque matin, recevez les 10 informations clés de l’actualité africaine.

Image

Contenus partenaires