Un monde complètement foot

Publié le 16 juillet 2006 Lecture : 6 minutes.

La soif de vaincre de Drogba
– À la lecture de l’article « Quand Milla critique Drogba » (J.A. n° 2371), je me suis posé des questions. Ainsi, « l’Ivoirien Didier Drogba [aurait] inutilement compliqué le jeu de son équipe ». Je tiens à rappeler que chaque attaquant évolue dans un registre qui lui est propre, et Drogba a le sien. Il n’est certes pas aussi technique qu’on pourrait le souhaiter, mais il reste puissant et très habile dans les airs. Emmanuel Éboué, lui, a montré ses limites au poste de latéral droit lors de ce Mondial. Drogba se bat comme il peut et transmet sa soif de vaincre à ses coéquipiers.
Innocent Ndry, Abidjan, Côte d’Ivoire

Zidane mérite le pardon
– Je pardonne au capitaine des Bleus son coup de tête au joueur italien. Nous devons tous l’excuser au nom de son talent. Zinédine Zidane, je vous souhaite une bonne retraite.

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Ces Africains qui font gagner la France
– Aucun observateur objectif ne peut nier cette réalité : le parcours exceptionnel de l’équipe de France lors des Coupes du monde de 1998 et de 2006 est largement dû au recours massif aux joueurs d’origine africaine ou antillaise. De tous les grands pays européens, la France est la seule habitée par un syndrome du tirailleur qui consiste à faire appel à une « légion étrangère » pour sauver la patrie en danger. Les joueurs africains d’aujourd’hui sont les dignes successeurs des tirailleurs d’hier. Au moment où Nicolas Sarkozy et d’autres candidats à l’élection présidentielle de 2007 chassent sur les terres de l’extrême droite en renvoyant les émigrés africains vers leurs terres d’origine, il faudrait s’interroger sur ce que serait le sport français sans les Noirs et les Arabes. Pourquoi ne trouve-t-on pas les équivalents des Zidane, Henry, Thuram, Makélélé, Vieira, Wiltord dans des domaines autres que le sport ?
Jean-Marc Nkeze, Douala, Cameroun

Les équipes africaines en défaut
– L’édition 2006 de la Coupe du monde a mis en évidence les graves lacunes auxquelles font encore face les équipes africaines dans des compétitions de cette envergure. C’est vrai qu’elles ont été souvent pénalisées par un arbitrage partisan voire hostile, mais les représentants de l’Afrique ont péché par trop de maladresses devant les buts adverses, trop d’attentisme et de fébrilité en défense. Autres défauts : les errements dans l’encadrement technique et le management des joueurs malgré les effectifs riches (Côte d’Ivoire, Tunisie), la rocambolesque valse des entraîneurs au Togo et les ridicules bras de fer à propos des primes.
Par-dessus tout, les équipes africaines auront péché par leur manque de modestie. Au lieu de se concentrer sur les matchs et de prouver leur efficacité sur le terrain, certains joueurs, présentés par la presse internationale (y compris Jeune Afrique) comme les vedettes du tournoi, se sont lancés dans des déclarations intempestives en alimentant des polémiques inutiles. Bravo tout de même à l’Angola et au Ghana.
Jean-Pierre Meboya, Yaoundé, Cameroun

Z comme Zizou
– Zidane est notre Zorro. De la dernière déclaration de la Maison Blanche sur la « légitime défense » d’Israël aux pratiques de nos employeurs qui nous traitent comme des produits jetables, en passant par les billets de la Coupe du monde raflés par les sponsors, tout n’est qu’injustice. Zidane a lavé l’affront et c’est sans doute là que réside le secret de la fascination du monde pour ce coup de tête.
Salim Samai, Berlin, Allemagne

France, nation Arc-en-Ciel
– La France est une nation Arc-en-Ciel comme l’Afrique du Sud. L’équipe des Bleus en est la meilleure preuve. Être français devrait être défini par l’appartenance culturelle et non plus par la naissance ou l’origine. Si les Français « de couleur » se sentaient aussi aimés et intégrés que ceux de l’équipe de France, il n’y aurait pas de soulèvement des banlieues ni de phrases assassines du type « la France, vous l’aimez ou vous la quittez ». La France de demain, c’est eux. Une France jeune, colorée et pleine d’espoir, et non pas vieillie, pessimiste et cynique. Aimons-nous et acceptons-nous les uns les autres au lieu de nous rejeter.
Jawad Bisbis, Nairobi, Kenya

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Pas de place pour les antifoot
– Il s’avère que la plus grande manifestation, tous genres confondus, intéressant et rassemblant le plus de monde à travers la planète est la Coupe du monde de football. Certes, le sport est l’une des écoles de la vie, mais l’argent est le nerf du football et le machiavélisme parfois sa devise – quand l’enjeu efface et dépasse le jeu. Le comble, c’est que les antifoot (ceux qui « s’en foutent ») passent pour des antipatriotes ! Comme si le patriotisme commençait dans les stades ou devant la petite lucarne.
Zied Bakir, Sfax, Tunisie

A quand un alter-mondial ?
– Je tiens à dire mon indignation suite à l’absence de retransmission de la Coupe du monde dans des pays où ce sport est adulé : le Maroc et l’Algérie, où, à chaque instant, des matchs ont lieu à chaque coin de rue, dans des petits terrains improvisés. Quelle est donc cette Fifa qui nous a privés de cette grande fête ? De quoi parle Blatter quand il évoque « la grande famille » du football ? Avec cette coupe du monde, c’est l’essence même du football qui est en train d’être pervertie. Sport populaire par excellence, sport des riches comme des pauvres, des Blancs et des Noirs, le football sera bientôt réservé à des millionnaires. À quand une alter-Coupe du monde, plus populaire, plus simple, plus passionnée ?
Wanis el-Kabbaj, Maroc

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Du ballon rond à l’Hémicycle
– L’élite politique française devrait avoir honte, non de l’équipe nationale de foot, composée à majorité de Noirs, mais plutôt de sa propre composition. Pourquoi, dans un pays aussi divers, aucun Noir (si l’on excepte les Antillais) ne se retrouve-t-il ni au Parlement ni au gouvernement ? Tous ces Noirs qui portent haut le drapeau du foot tricolore le méritent. On ne leur a pas fait de cadeau, on a seulement fait appel au talent et au mérite. Ce n’est guère le fait de la discrimination positive, mais d’un réalisme sportif. Sur le plan politique, ce n’est point le même cas tant les portes restent hermétiquement cadenassées, comme pour les postes à responsabilité en entreprise, où les Noirs et les Arabes, même surdiplômés et méritants, rencontrent moult difficultés. Le visage de l’équipe nationale devrait inspirer la classe politique pour briser son opacité et son hypocrisie.
Yaya Traoré, Dreux, France

Figure maternelle intouchable
– Le geste de Zizou est impardonnable comme l’a admis Zidane lui-même. D’un coup, les réactions et condamnations ne se sont pas fait attendre. Nombre d’entre elles ont visé une seule personne, Zidane. Le défenseur italien semble ainsi être béatifié. À mon avis, on s’attaque là uniquement aux effets, et on laisse de côté les causes. Si Zidane a envoyé au tapis l’Italien, cela veut dire qu’il y a eu évidemment une raison grave. Retirer à Zidane son titre de meilleur joueur de ce Mondial et ne rien faire à l’égard de l’injurieux défenseur italien serait la décision la plus injuste que Blatter et son équipe pourraient prendre. Je pense que la Fifa doit durcir non seulement les règles du jeu, mais aussi celles du savoir-vivre sur le terrain. Insulter sa mère est pour un Africain (Zidane est africano-français) une injure très grave. S’il y a quelqu’un à punir de la façon la plus exemplaire pour le moment, ce doit être l’Italien. Que justice soit faite.
Johnny Ntumba Dipa, Osaka, Japon

Cissé le maudit
– Gravement blessé le 7 juin dernier à Saint-Étienne, lors de l’ultime match test avant la Coupe du monde, l’attaquant français était invité à se ressourcer sur son continent d’origine. « Il faut que Djibril Cissé vienne en Afrique. Il n’est jamais venu sur le continent. C’est vrai que Djibril est né et a grandi en France. Et la mentalité là-bas est complètement différente de celle de l’Afrique. J’espère que tous ses déboires vont le convaincre de venir enfin sur le continent », déclarait son père Mangué Cissé, le 13 juin dernier sur la première chaîne de télévision ivoirienne (RTI). En filigrane, il voulait peut-être dire que son fils devrait venir recevoir l’onction de ses ancêtres afin d’être lavé de la malchance qui semble lui coller à la peau depuis quelques années. En tant qu’ancien footballeur professionnel et international ivoirien, Mangué Cissé sait mieux que quiconque que seul le travail, le talent et la discipline permettent de devenir un sportif de haut niveau. Mais il sait aussi qu’avec l’onction des siens le sportif est encore plus solide.
Jacques-Éric Andjick

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