Communication

Publié le 16 avril 2006 Lecture : 3 minutes.

Un an après l’élection de Faure Gnassingbé – fils de son père et plus jeune chef d’État du continent derrière cet autre héritier qu’est Joseph Kabila -, le Togo a-t-il changé ? Il faut une bonne dose d’optimisme pour y croire, tout comme il faut de bons yeux pour déceler le mouvement sous les eaux dormantes de la lagune de Bè, tant les apparences sont contraires. Après treize années ininterrompues de suspension de l’aide internationale et presque autant de crise politique, le pays semble vivre sous anesthésie et sa population survivre au jour le jour, sans que l’on sache en définitive qui, d’un régime mutique et d’une opposition archaïque, est le principal responsable de cette atonie généralisée. Les deux sans doute, puisque l’histoire récente du Togo ressemble à un combat permanent pour le pouvoir entre des adversaires pareillement autistes et recrus d’épuisement. Bref, à un formidable gâchis.
Pourtant, cette impression déprimante cache une réalité qui l’est, heureusement, un peu moins. Issus d’un régime autocratique, certes, mais qui eut ses heures de gloire économique, les fondamentaux de l’édifice togolais sont encore honorables. On ignore ainsi généralement que, par rapport au Bénin voisin, dont l’image de marque est nettement plus avantageuse, le Togo enregistre des taux d’analphabétisme et de mortalité infantile inférieurs, une meilleure scolarisation, une espérance de vie et un PIB par habitant supérieurs. Et cela malgré plus d’une décennie de sanctions. On ignore aussi, sauf à décrypter les silences du palais présidentiel, qu’il n’y a plus à Lomé de prisonniers politiques, que les délits de presse n’y sont plus passibles de prison (selon Reporters sans frontières, la liberté d’expression y est équivalente à celle dont jouit le Sénégal ou le Ghana), que la police a remplacé l’armée dans les rues et que la mémoire de Sylvanus Olympio, le premier président du Togo, assassiné en 1963, a été réhabilitée.

C’est au courage et à l’ingéniosité de son peuple que le Togo doit de ne pas avoir sombré, et c’est grâce à la volonté d’ouverture de son jeune président que l’apaisement et la réconciliation sont désormais à l’ordre du jour. Mais qui le sait ? Très différent de son père, secret au point de paraître contraint et de donner à l’extérieur l’impression – fausse, sans doute – de ne pas être tout à fait maître de son destin, Faure Gnassingbé, 40 ans le 6 juin prochain, ne communique pas ou peu, y compris en direction de ses compatriotes. À l’heure de l’Internet, ce déficit est peu compréhensible de la part d’un chef d’État pourtant féru de nouvelles technologies interactives. Comment s’étonner, dès lors, que nul ne s’émeuve de voir le Togo continuellement (et injustement) rangé par les eurocrates et les bailleurs de fonds dans la même catégorie que le Zimbabwe et l’Érythrée, pays parias sous sanctions ? « Never explain, never complain » (« Ne jamais s’expliquer, ne jamais se plaindre ») : cette devise de la monarchie britannique assiégée par les médias aurait-elle cours dans un pays dont le sort – hélas ! – ne semble préoccuper que ses propres habitants ? Si la discrétion au sommet est une vertu et peut-être une technique de gouvernement, son excès peut laisser croire que le navire n’a pas de capitaine – ou que ce dernier s’est assoupi. À tort, bien sûr, en ce qui concerne le Togo et son président. Mais Faure Gnassingbé devrait tout de même prendre garde aux fausses impressions, se faire (un peu) violence et découvrir les vertus de la pédagogie. En Afrique, plus qu’ailleurs peut-être, un chef c’est un visage, une voix et un message

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