« Manque à prêter »

Publié le 15 octobre 2006 Lecture : 2 minutes.

Le rapport 2006 du Fonds monétaire international (FMI) vaut le détour. Publié en version française au début d’octobre1, il montre que l’institution de Bretton Woods, forte de 184 pays membres, est à un tournant de son histoire. Créé en 1945, le FMI a pour mission principale d’aider les pays qui ont des problèmes de balance des paiements et qui ne peuvent emprunter sur les marchés financiers à des conditions abordables. À la fin de l’exercice 2006, l’encours de ses crédits a atteint le niveau le plus faible depuis vingt-cinq ans : 23 milliards de DTS2. Pourquoi ? Simplement parce que les pays en difficulté choisissent de moins en moins de s’adresser au FMI pour éviter de se soumettre à ses conditions draconiennes (réformes structurelles, ajustement budgétaire, contrôle des dépenses et des capitaux). Le marché libre des capitaux est aujourd’hui suffisamment liquide. Et les rares pays qui ne peuvent y accéder – notamment africains – s’adressent aux nouveaux prêteurs que sont devenues la Chine, l’Inde ou la Russie, lesquelles ne posent aucune condition politique ou économique, en dehors de l’achat de leurs produits ou services. Cette nouvelle donne inquiète le FMI et les bailleurs de fonds classiques : elle entraîne une spirale d’endettement incontrôlé Plus grave, elle réduit la clientèle du FMI.
Au cours de l’exercice 2006, le FMI n’a prêté qu’à quatorze pays – dont cinq africains – pour un montant dérisoire de 8,5 milliards de DTS, dont 85,7 millions pour les cinq pays du continent (Cameroun, Bénin, Malawi, Niger, São Tomé e Príncipe). À ce « manque à prêter » s’ajoutent les remboursements anticipés. Plusieurs pays qui profitent d’une aisance financière retrouvée veulent sortir plus vite du contrôle du FMI. Ce dernier a ainsi reçu 22 milliards de DTS avant l’échéance, notamment du Brésil, de l’Argentine, de l’Algérie, de la Bulgarie et de l’Uruguay. Ces deux phénomènes ont fait chuter les encours du FMI et, partant, ses revenus (intérêts et commissions), à 1,8 milliard de DTS en 2006, contre 2,4 milliards en 2005.
Avec un staff de 2 716 personnes et des dépenses de 1,5 milliard de DTS, le solde positif est en nette diminution : 280 millions, contre 666 millions. Si rien ne change, le FMI sera bientôt déficitaire. Une catastrophe que le directeur général, Rodrigo de Rato, doit absolument prévenir. Il lui faut dégager de nouvelles sources de revenu « stables et fiables à long terme ». En investissant autrement ses énormes excédents (120 milliards de DTS).

1. Rapport annuel du conseil d’administration pour l’exercice clos le 30 avril 2006, 254 pages. Il peut être commandé gratuitement sur www.imf.org
2. Le DTS (droit de tirage spécial) est la monnaie du FMI ou unité de compte. Son taux est fixé quotidiennement par le FMI en fonction des cours d’un panier de devises. Le 10 octobre, 1 DTS valait, par exemple, 1,47 dollar américain et 1,17 euro.

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