Le Maroc a-t-il une politique israélienne ?

Publié le 15 juillet 2007 Lecture : 3 minutes.

La brève visite à Rabat, fin mai, d’Aaron Abramowicz, le directeur général du ministère israélien des Affaires étrangères, avait pour but de préparer la rencontre à Paris entre Mohamed Benaïssa, le chef de la diplomatie marocaine, et sa collègue Tzipi Livni, en marge du séjour de celle-ci en Europe.
Cette rencontre était d’autant plus significative qu’elle s’inscrivait dans le droit fil de l’adoption, les 28 et 29 mars dernier lors du sommet de la Ligue arabe de Riyad, de « l’initiative de paix saoudienne », qui reprenait les grandes lignes de la résolution adoptée par le sommet de Beyrouth, en 2002, sous l’impulsion du roi Abdallah d’Arabie saoudite, alors prince héritier.
Président du Comité Al-Qods, Mohammed VI a apporté son soutien résolu au « plan de paix arabe » adopté à la quasi-unanimité, la Syrie et le gouvernement palestinien, alors dirigé par Ismaïl Haniyeh, se contentant d’une abstention valant tacite approbation. C’est d’ailleurs de cette initiative historique et d’une amélioration substantielle des conditions de vie des Palestiniens dont ont discuté Benaïssa et Livni, la partie marocaine rappelant « l’engagement permanent du Maroc envers la cause légitime du peuple palestinien et, partant, son attachement à l’unité du peuple palestinien ».
C’est là la doctrine constante de la diplomatie marocaine qui, ces dernières années, a refusé de parler d’une « normalisation » des rapports avec Israël, tout en manifestant, à plusieurs reprises, son souci d’ouverture par des gestes concrets. C’est ainsi que, depuis 2004, le ministère du Tourisme favorise la venue dans le royaume de groupes de touristes israéliens d’origine marocaine. Et que des diplomates marocains ont participé à diverses conférences internationales ou régionales où était présente une délégation israélienne, envers laquelle ils ont simplement fait preuve de courtoisie.

La presse israélienne ne cache pas que le Premier ministre Ehoud Olmert aurait souhaité que la délégation qui, le 12 juillet, lui a officiellement présenté « l’initiative saoudienne » comprenne, outre Abdallah al-Khatib et Ahmed Aboul Gheit, les ministres des Affaires étrangères jordanien et égyptien, des représentants de pays arabes modérés – et du Maroc en premier lieu. Selon des indiscrétions distillées par les journaux, le chef du gouvernement israélien ne cache pas qu’il serait honoré de rencontrer Mohammed VI pour l’informer de la réponse qu’Israël compte apporter à « l’initiative arabe ». Une manière de contourner le refus d’Abdallah d’Arabie saoudite de s’entretenir avec lui et, plus encore, de l’inviter à se rendre à Riyad.
Les entretiens de Paris se sont donc limités à un tour d’horizon de la situation préoccupante qui prévaut au Proche-Orient et à des discussions sur les moyens pratiques d’améliorer les conditions de vie déplorables des Palestiniens, victimes, des mois durant, d’un embargo économique et financier de la part d’Israël et de la communauté internationale. Haaretz, le quotidien israélien libéral, croit même savoir que Tzipi Livni disposait d’informations concernant la préparation d’une attaque terroriste d’envergure contre le Maroc, lesquelles recoupaient d’autres informations transmises à Rabat par les États-Unis et l’Union européenne.

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Quoi qu’il en soit, cette rencontre souligne la longue tradition d’implication du Maroc dans le dossier israélo-arabe par le biais d’initiatives – certaines spectaculaires, d’autres plus discrètes – qui, dans le passé, ont eu un rôle et un retentissement considérables. Ces précédents incitent à penser que le Maroc pourrait, à l’avenir, continuer de tenir un rôle de première importance. Il en a la légitimité puisqu’il fut à l’origine, lors du sommet de Rabat, en 1974, de la reconnaissance de l’OLP comme seul représentant des Palestiniens. Il pourrait ainsi accueillir de nouveaux sommets arabes consacrés à cette question et jouer un rôle de médiateur grandement facilité par la confiance que lui accordent les parties en présence.
C’est la raison pour laquelle il serait souhaitable qu’un organisme politique d’État définisse la position marocaine vis-à-vis d’Israël et formule un certain nombre de recommandations et de suggestions. L’existence d’un tel organisme permettrait au Maroc de renforcer son rôle diplomatique, très important sur la scène internationale et dans le monde arabe, et d’apporter, dans un dossier aussi complexe, son expérience et sa vision originale.

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