Embrouille à Abuja

Publié le 15 janvier 2006 Lecture : 2 minutes.

Encore raté. À moins d’un coup de théâtre, la seconde tentative de privatisation de Nigeria Telecommunications Limited (Nitel) semble promise à l’échec. Et Orascom Telecom en sera pour ses frais. Le 10 janvier, le Bureau of Public Enterprises (BPE), qui avait mené l’appel d’offres à son terme et déclaré vainqueur le groupe égyptien, a annoncé qu’il était prêt à reprendre la procédure de zéro si son autorité de tutelle, le National Council on Privatisation (NCP), le lui demandait. Le NCP est bien le seul organisme à ne s’être pas encore prononcé. Car une incroyable tempête agite les milieux d’affaires du pays depuis le 30 décembre, date de la « victoire » d’Orascom. « Voilà un imbroglio comme seul le Nigeria est capable d’en produire ! » résume un banquier d’affaires.
Première pomme de discorde, le déroulement des enchères. Deux candidats restaient en lice à l’avant-dernier round. En tête, Newtel, groupe d’investisseurs locaux, qui proposait 155 millions de dollars, 27 millions de dollars de mieux qu’Orascom. Le BPE juge ces montants insuffisants et lance une nouvelle enchère. Mais Newtel n’y participe pas. Le BPE accepte alors l’offre de l’égyptien, 256 millions de dollars pour 51 % de l’opérateur historique et de sa filiale de téléphonie mobile Mtel, tout en déclarant qu’elle est « bien inférieure au prix-plancher que nous nous sommes fixé », sans préciser ce prix-plancher. Ce commentaire a déclenché toutes sortes d’hypothèses, dont la plus étonnante concerne l’abandon de Newtel dans la dernière ligne droite. Alors qu’il était prêt à miser 500 millions de dollars – selon ses dires -, le groupe aurait été contraint de jeter l’éponge à cause d’Orascom ! Car celui-ci venait, le 21 décembre (soit plus d’une semaine avant les deux dernières enchères), de prendre 19 % du capital d’Hutchinson Telecom, un groupe de Hong Kong (voir J.A.I. n° 2346-2347), qui se trouve être la maison mère d’Essar, le partenaire technique de Newtel. Ce dernier, ainsi privé de compétences opérationnelles, ne répondait plus aux exigences du cahier des charges et ne pouvait rester en course.
Pour rocambolesque qu’elle soit, cette explication trahit la vraie raison de la discorde : les Nigérians considèrent que, à 256 millions de dollars, l’opérateur national est « bradé ». Le président Obasanjo lui-même a indiqué, le 4 janvier, que le montant de la transaction n’était pas assez élevé. La somme est certes cinq fois moindre que ce qu’aurait pu rapporter, en 2002, la précédente tentative de vente de Nitel (1,3 milliard de dollars)… si le groupe d’investisseurs locaux, Investors International London Limited (IILL), avait pu réunir la somme. Cette fois-ci, l’acquéreur a sans aucun doute les moyens de faire le chèque, mais le vendeur n’en veut pas. Tandis que son sort ne semble pas près de se régler, la situation financière de Nitel continue de se dégrader. Les autres candidats à sa reprise, dont l’opérateur panafricain Celtel, avaient abandonné la course dès la mi-décembre après avoir constaté les sureffectifs et l’endettement du groupe. Reste à savoir qui s’intéressera à sa troisième mise en vente, si d’aventure elle devait intervenir.

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