Comment Dubaï a gagné Dakar

La victoire de Dubai Ports World sur Bolloré confirme la percée des États du Golfe au Sénégal.

Publié le 14 octobre 2007 Lecture : 2 minutes.

Cette fois, c’est officiel. Le président de Dubai Ports World (DP World), Sultan Ahmed Bin Sulayem a signé le 8 octobre un accord avec le Premier ministre sénégalais, Cheikh Hadjibou Soumaré, pour une concession de vingt-cinq ans sur le terminal à conteneurs du port de Dakar. L’opérateur historique présent au Sénégal depuis plus de quatre-vingts ans, le groupe Bolloré a perdu. Alors que la manutention portuaire représente 40 % de son chiffre d’affaires sénégalais, l’entreprise française voit son leadership contesté par de nouveaux opérateurs particulièrement agressifs.
La victoire d’une société des Émirats arabes unis souligne également la récente percée de nombreuses entreprises des États du Golfe dans un pays qui a longtemps fait figure de « chasse gardée » de la France. Le coup est rude d’autant plus que, sur l’ensemble de l’Afrique francophone, les nouveaux investisseurs chinois ou arabes multiplient ce cas de figure dans d’autres secteurs d’activité (infrastructures, mines, BTP). Bien que présentant une offre moins alléchante que Bolloré qui annonce avoir proposé 384 milliards de F CFA, DP World a remporté le marché grâce à trois atouts imparables.

Son offre était imbattable
Le premier est d’ordre politique. En avril dernier, le président sénégalais Abdoulaye Wade a effectué une visite aux Émirats et a lui-même invité l’entreprise à répondre à l’appel d’offres. À l’approche du 11e sommet de l’Organisation de la Conférence islamique (OCI), en mars 2008, les capitaux islamiques affluent à Dakar. Les Dubaïotes ont ensuite l’avantage d’être « efficaces et rapides », selon le patron de DP World. Devenue en quelques années le troisième opérateur mondial, sa société ne gérait que 2 ports en 1998 contre 42 concessions aujourd’hui. Son entreprise s’est engagée à moderniser le site de Dakar pour quelque 80 milliards de F CFA. Pour 250 milliards de F CFA, elle va également réaliser le « port du futur », l’un des grands projets du président Wade. La livraison des nouvelles infrastructures est prévue pour 2012. Autre atout, Dubaï mène une stratégie globale. Jebel Ali Freezone (Jafzsa), une filiale de Dubai World – maison mère de DP World – va réaliser une zone économique intégrée (lire encadré). Jafzsa a également conclu un partenariat avec le groupe saoudien Ben Laden sur le projet du nouvel aéroport international de Diass.
Grâce à cette victoire, DP World fait une entrée fracassante en Afrique de l’Ouest. Avec un trafic de 9,9 millions de tonnes en 2006, le port de Dakar, situé au 9e rang sur le continent, bénéficie d’une position stratégique qu’il doit à sa rade bien abritée. Avec un trafic par conteneurs en augmentation de 17 % entre 2005 et 2006, il assure la desserte du Mali. La capitale sénégalaise étant l’une des clés de son maillage africain et de ses prestations logistiques, Bolloré espère encore conclure un accord avec DP World pour conserver une partie de la manutention portuaire. « Mais ce qui a perdu les Français, c’est le manque d’ambition », conclut un observateur. Pouvait-il en être autrement face à une stratégie alimentée par les pétrodollars ?

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