Ibrahim Awad

Directeur du programme des migrations au Bureau international du travail (BIT)

Publié le 14 septembre 2008 Lecture : 2 minutes.

Jeune Afrique : Quelle est l’ampleur de l’immigration en Afrique ?
Ibrahim Awad : Il n’existe pas de données chiffrées exactes, mais on estime qu’il y a deux fois plus de migrants internationaux en Afrique de l’Ouest qu’en Europe. Seuls 3 % des émigrés maliens sont en Europe ! En Afrique, le nationalisme va à l’encontre de l’histoire du continent. Avant la colonisation, n’oublions pas qu’il n’y avait pas de frontières ! Les frontières sont validées au niveau international, mais souvent elles n’ont aucun sens au niveau local. Lorsqu’on appartient au même groupe ethnique, les déplacements sont naturels même s’ils doivent passer par une frontière. D’ailleurs, ces frontières souvent très larges sont difficilement contrôlables. Maintenant qu’elles existent, on ne peut plus les supprimer, il faut bien faire avec

Est-il souhaitable de les contrôler ?
Non. On pourrait très bien imaginer une région déterminée avec des mouvements de population réguliers, légaux. Ils participeraient d’ailleurs au développement d’une région commune. Les migrations permettraient de renforcer la coopération régionale, dans un premier temps, puis continentale. L’immigration peut être un vecteur de stabilité régionale.

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D’ailleurs, toutes les organisations régionales (Cedeao, SADC) prévoient la libre circulation des personnes. Comment expliquer que cette disposition ne soit pas appliquée partout ?
La totale circulation des personnes n’est pas appliquée en Afrique, comme partout dans le monde, car les revenus entre pays sont différents. Il y a une contradiction entre la volonté des États de construire un marché du travail à un niveau national, tout en s’intégrant dans une logique régionale. Un État a pour vocation de favoriser ses citoyens, particulièrement dans des conditions de pénurie de travail. L’immigration devient un problème, elle crée des déséquilibres dès lors qu’il y a une inégalité de développement entre deux pays, de la concurrence sur le marché du travail, des disparités en termes de pauvreté et des conditions de vie difficiles pour les autochtones. Il faut privilégier des approches régionales pour réduire la pression sur un seul marché national.

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