Nucléaire iranien : les conseils de Merkel
Angela Merkel s’est affirmée comme le dirigeant européen qu’il faut suivre. En partie par défaut : Tony Blair et Jacques Chirac sont désormais rangés dans la catégorie des canards boiteux, et Romano Prodi n’a pas encore pris les choses en main en Italie. Mais, depuis qu’elle est devenue chancelier en novembre dernier, Merkel, qui est originaire d’Allemagne de l’Est et physicienne de formation, a fait preuve d’un réel talent de diplomate efficace et discrète. Elle l’a démontré sur le Vieux Continent, où elle a négocié en janvier un très important compromis sur le budget de l’Union européenne. Elle l’a démontré aussi à New York, où elle a été le premier chancelier allemand à prendre la parole à la conférence annuelle du Comité juif américain, et elle semble le démontrer à Washington, où elle a conquis le président George W. Bush par sa franchise et « l’excellente analyse qu’elle fait de la situation internationale » (c’est lui qui le dit).
Au cours de ce voyage aux États-Unis, elle a parlé de l’Iran, et nous espérons que Bush l’a écoutée. Le message de Merkel est, en deux mots, que la meilleure chance de persuader l’Iran de renoncer à son programme d’arme nucléaire est une diplomatie patiente, à petits pas, prévoyant des contacts directs entre Washington et Téhéran. Cela nous paraît marqué au coin du bon sens, d’autant plus que Merkel est venue à Washington une semaine après avoir rencontré en Russie le président Vladimir Poutine et quinze jours après s’être entretenue en Chine avec le président Hu Jintao, les deux dirigeants les plus opposés à des sanctions contre l’Iran, et donc les deux qui feraient pencher la balance s’ils décidaient de se joindre à un front commun contre l’Iran.
La position de Merkel est tout à fait claire : en aucun cas, dit-elle, Téhéran ne doit entrer en possession de l’arme nucléaire. Elle n’est pas non plus opposée à une action du Conseil de sécurité contre l’Iran, à condition qu’il y ait le plus vaste soutien possible. Mais elle ne cache pas non plus que menacer l’Iran d’une intervention militaire ne peut que compliquer les choses. C’est la sagesse même. Bush devrait comprendre que, contrairement à son prédécesseur Gerhard Schröder, Merkel ne joue pas une carte antiaméricaine minable, et que sur l’Iran, elle incarne un consensus beaucoup plus large que celui qui existait sur l’Irak.
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