Fin de production ?

Publié le 13 mars 2005 Lecture : 2 minutes.

Catastrophe sanitaire en vue. L’Inde, premier producteur de médicaments génériques et principal fournisseur des pays en développement en antirétroviraux (ARV) à faible coût, a rejoint les rangs de l’Organisation mondiale du commerce (OMC). En conséquence, le pays doit se conformer à ses règles. Mais le ministre de l’Industrie, Kamal Nath, semble avoir opté pour l’excès de zèle.
Selon les règles de l’institution, l’Inde doit désormais protéger les produits, alors que seuls les procédés étaient jusqu’ici sous brevet. Ce qui autorisait les entreprises pharmaceutiques locales à produire des copies d’ARV, identiques aux originaux, en modifiant de manière imperceptible la chaîne de fabrication. Une technique dont ne pourront plus bénéficier les nouveaux médicaments, ni d’éventuelles nouvelles utilisations d’anciennes molécules.

Les associations de lutte contre le sida avaient, en 2001, exercé une pression telle que l’accord sur les aspects des droits de propriété intellectuelle qui touchent au commerce (dit Adpic) avait admis la possibilité de « licences obligatoires » pour les pays en situation d’urgence sanitaire devant se procurer des médicaments à prix abordables. Les États pouvaient casser les brevets en versant une indemnité à leurs détenteurs, et importer les produits concernés.
Or Kamal Nath, que l’on dit « proche » d’un grand groupe pharmaceutique américain, a élaboré un projet de loi, discuté cette semaine au Parlement indien, qui inclut deux clauses extrêmement strictes. La première vise à prolonger la durée des brevets au-delà des vingt ans requis par l’OMC, en autorisant le brevetage de nouvelles indications, de nouveaux dosages, de nouvelles combinaisons, bref, de toute nouveauté concernant un produit déjà existant. La seconde impose d’infranchissables restrictions sur l’émission des licences obligatoires pour les marchandises destinées à l’exportation, ce qui est le cas de la grande majorité des médicaments manufacturés en Inde.
Un exemple suffit pour prendre la mesure des conséquences désastreuses du vote probable de cette loi : le Combivir, l’ARV le plus utilisé au monde, pourrait se retrouver sous brevet. Son générique disparaîtrait. Une copie pourtant prescrite à 50 % des Indiens et à 30 % des Africains séropositifs sous traitement. Par ailleurs, toutes les nouvelles molécules seront distribuées au prix fort. Or les résistances aux traitements obligent des modifications de leur contenu, et donc l’accès au plus grand nombre possible d’ARV.
Si cette loi est votée en l’état, le nombre de décès liés au sida, et à d’autres maladies, car l’industrie pharmaceutique du générique dans son intégralité est ici concernée, repartira à la hausse. Et les avancées obtenues ces cinq dernières années, qui ont permis l’accessibilité aux traitements dans les pays du Sud, risquent d’être réduites à néant.

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