Du militaire au civil

Réputé surtout pour ses avions de combat, le constructeur aéronautique français mise désormais sur les jets privés.

Publié le 13 mars 2005 Lecture : 3 minutes.

Albert de Monaco, plusieurs présidents de grandes entreprises, quelques milliardaires… et George W. Bush en personne. Charles Edelstenne, 67 ans, PDG de Dassault Aviation, ne confirme pas la rumeur, même si, visiblement, elle le réjouit : le paraphe de l’actuel président des États-Unis figurerait au bas de l’un des cinquante et un bons de commande du futur Falcon 7X. Prochain modèle de la gamme de jets d’affaires du groupe français, il a été dévoilé au public le 15 février, à Bordeaux, et n’entrera en service qu’à la fin de 2006. Mais, dès aujourd’hui, l’usine sait que son plan de charge est assuré jusqu’à la fin de 2008, à raison de deux appareils par mois. Au total, le groupe Dassault espère vendre 300 à 400 exemplaires de son nouveau bébé dans les quinze prochaines années. Prix : 27 millions d’euros l’unité, aménagement intérieur en sus.
Première explication de ce succès : à sa mise en service, le 7X sera l’un des rares de sa catégorie à permettre des vols directs Los Angeles-Paris, Paris-Tokyo ou New York-Dubaï. Doté d’un rayon d’action de 10 500 kilomètres, ce triréacteur d’une capacité maximale de 19 passagers peut voler à près de 1 000 km/h à 15 000 m d’altitude, exactement comme un avion de ligne. À une différence près, appréciée des hommes d’affaires : le gain de temps.
Le Falcon 7X bénéficie en outre de la notoriété de son constructeur dans le domaine. Il sera le sixième modèle construit par Dassault, qui a vendu plus de 1 700 Falcon depuis les années 1960 et revendique plus de 50 % du marché de l’aviation d’affaires, catégorie jets privés, devant l’américain Gulfstream et le canadien Bombardier. L’appellation Falcon (« faucon ») remonte à 1963, quand un certain Charles Lindbergh, chargé de créer une division aviation d’affaires au sein de la compagnie américaine PanAm, passa commande de 40 Mystère 20 à un certain Serge Dassault, alors âgé de 38 ans. PanAm a disparu, Serge Dassault a passé le témoin du groupe familial en 2000 pour se lancer dans la création d’un empire médiatique, mais les Falcon ont traversé le temps. Le plus célèbre reste à ce jour le Falcon 50. À sa sortie, en 1974, il était le premier de sa catégorie (8 à 10 passagers) capable de traverser l’Atlantique sans escale.
L’avionneur français entend enfin tirer parti de la reprise du marché de l’aviation d’affaires aux États-Unis, où il vend plus de la moitié de sa production. Dassault Aviation a d’ailleurs soigneusement choisi la date de la première sortie en public de son nouveau-né, intervenue deux jours avant l’annonce de ses résultats financiers pour l’exercice 2004. Après avoir fait le dos rond en 2003, le groupe affiche un chiffre d’affaires en amélioration de 5 %, à 3,46 milliards d’euros, dont 61 % correspondent aux ventes de Falcon, tous modèles confondus. Son carnet de commandes s’étoffe encore plus nettement pour atteindre 4,02 milliards d’euros, contre 2,4 milliards à la même époque l’année dernière. Un quasi-doublement, qui s’explique par la signature de commandes pour 69 Falcon avec divers clients, soit 29 appareils de plus en un an (+ 75 %), et pour 59 avions militaires Rafale avec un seul acquéreur : l’État français. Cette « rallonge » de l’armée française, qui a déjà acheté 120 Rafale sur un total prévu de 594, ne suffit pas à masquer le quasi-échec de cet avion de combat du iiie millénaire, qui ne trouve toujours pas preneur en dehors de l’armée tricolore. Son concurrent de Boeing, le F15E, équipe déjà l’armée américaine (qui en a commandé 520), mais aussi celles du Japon, de l’Arabie saoudite et de la Corée du Sud. Joli retournement historique : Dassault Aviation avait construit sa réputation sur le Mirage III, vendu à 1 400 exemplaires dans onze pays, et l’aviation d’affaires n’a longtemps été qu’une activité annexe. L’avenir du groupe repose désormais sur la réussite du programme Falcon 7X, pour lequel Dassault a investi 550 millions d’euros.

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