Blair publie sa feuille de route

Publié le 13 mars 2005 Lecture : 3 minutes.

Rendu public le 11 mars, le rapport de la Commission pour l’Afrique, chère à Tony Blair, s’il ne présente pas de grandes nouveautés, a le mérite de jouer cartes sur table, de proposer des échéances chiffrées et de mettre sur un pied d’égalité Africains et Occidentaux.

Parmi les seize membres de la Commission choisis par les Britanniques, le Français Michel Camdessus, l’Éthiopien Mélès Zenawi et le Sud-Africain Trevor Manuel. Fruit d’une année de travail, ce document de 400 pages fait le point sur l’état de l’Afrique et formule quelques recommandations pour sortir le continent de la pauvreté, considérée comme « la pire tragédie de notre époque ».
Sorte d’« auberge espagnole » de l’aide au développement de l’Afrique, le rapport Blair largement inspiré des théories de Jeffrey Sachs, conseiller spécial de Kofi Annan – présente toute une série de mesures à mettre en oeuvre dans les plus brefs délais. D’ici à 2010, l’aide publique au développement de l’Afrique doit être multipliée par deux pour atteindre 50 milliards de dollars par an. La participation occidentale à l’amélioration des infrastructures devra s’élever à 10 milliards de dollars par an pendant les cinq prochaines années, pour grimper à 20 milliards en 2010. Dix à 20 milliards par an devront être consacrés aux réformes des systèmes de santé, 7 à 8 milliards à l’éducation, et 10 milliards à la lutte contre le sida. Le rapport demande également aux pays développés de participer à la moitié de l’effort de maintien de la paix de l’Union africaine (UA) et insiste particulièrement sur la lutte contre la corruption, tant du côté des corrompus que des corrupteurs. Le rapport enjoint aux grandes entreprises occidentales de se rallier à l’Extractive Industries Transparency Initiative (Eiti), lancée en 2002 en Grande-Bretagne et visant à rendre transparents leurs paiements aux gouvernements du continent. Et il demande aux Africains de mettre en place des systèmes de gestion financière assainis, auxquels la société civile doit pouvoir participer et qu’elle pourra critiquer.

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Pour concrétiser ces bonnes intentions, le rapport prône l’effacement total de la dette multilatérale par la Banque mondiale, le Fonds monétaire international et la Banque africaine de développement ; il renouvelle la proposition, formulée en février par Gordon Brown, chancelier de l’Échiquier, d’un financement de l’aide par des emprunts sur les marchés financiers (International Financial Facilities, IFF), en mentionnant la possibilité de lever également une taxe sur les billets d’avion (mesure proposée par la France) ; il demande la suspension immédiate des subventions aux agriculteurs occidentaux pour le coton et le sucre, et juge nécessaire la réussite des négociations de l’OMC, en décembre, à Hong Kong, pour aboutir à une levée définitive de toutes les subventions agricoles d’ici à 2010 ; enfin, il brocarde les pays industrialisés qui n’ont pas encore versé les sommes qu’ils avaient promises aux Africains pour les aider à lutter contre le sida.
Applaudies par les institutions internationales, ainsi que par la France, qui a « salué l’initiative » (sans pour autant se prononcer clairement sur son intention de soutenir toutes les propositions de la Commission), les recommandations devront, pour entrer dans les faits, être approuvées par la majorité des pays donateurs lors du sommet du G8, à Gleneagles, en juillet. Or les États-Unis ont déjà fait savoir qu’ils s’opposaient à plusieurs d’entre elles, dont la baisse des subventions sur le coton, tandis que le Japon et l’Allemagne restent discrets sur le sujet (peut-être vexés de n’avoir pas été représentés au sein de la Commission Blair). Le Premier ministre britannique a encore du pain sur la planche s’il veut se faire une place dans l’histoire du développement de l’Afrique.

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