Partage du pouvoir

Publié le 13 février 2005 Lecture : 2 minutes.

La mort subite, il y a une semaine, du président Gnassingbé Eyadéma, qui a gouverné la République togolaise d’une main de fer tout au long des trente-huit dernières années, ouvre, devant ce petit pays africain de 57 000 km2 et de 5 millions d’habitants, les portes de l’inconnu : s’il entrait dans la zone de turbulence qui semble vouloir le happer, l’Afrique de l’Ouest tout entière – quinze pays (dont le Nigeria : 133 millions d’habitants) totalisant 250 millions d’habitants* – se trouverait plus proche encore qu’elle ne l’est aujourd’hui de l’instabilité, source de régression politique et économique.
Le Liberia, la Sierra Leone, et même la Guinée-Bissau, ont été frappés par la guerre civile et en sont encore à panser leurs plaies ; la Côte d’Ivoire, qui fut synonyme de stabilité et de prospérité, est tombée de son piédestal il y a plus de cinq ans et, à ce jour, n’est pas parvenue à se relever.
Nous redoutions, pour la Guinée-Conakry, une fin de régime difficile, mais c’est au Togo qu’elle est d’abord intervenue.

Dans le dossier de douze pages que nous consacrons à l’événement, vous trouverez nos réponses aux principales questions que vous vous posez. Tout au long des prochaines semaines, nous suivrons pour vous les développements de cette affaire, dont nous pensons qu’ils peuvent affecter l’ensemble de la région.

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À ce que vous lirez plus loin (pages 8-19) et dans nos prochains numéros, je n’ai à ajouter que ceci.
Comme dans bien des pays (africains et non africains) où la nation est encore en formation, au Togo, le Nord et le Sud sont… deux pays en un. Ils s’observent, voire se surveillent, vivent côte à côte sans trop se mélanger, ni encore moins fusionner.
Chacun des deux veut pour les siens le pouvoir politique et économique ou militaire, et est enclin à l’accaparer, à le dénier à l’autre.
Plus grave encore : celui des deux qui prend le pouvoir s’empare de tous les avantages qu’il procure ; celui qui s’en trouve exclu n’a rien, même pas les miettes.

Là est la source des guerres civiles africaines, et c’est ce qu’il faut corriger si l’on veut supprimer ce qui les fait naître et durer.
Au Togo, ni les gens du Nord, bien qu’ils détiennent le pouvoir militaire, ni ceux du Sud, plus nombreux dans le secteur politique, ne peuvent gouverner le pays les uns sans les autres.
Il faut qu’ils en soient convaincus et qu’ils recherchent le juste partage du pouvoir.
L’Union africaine, la Francophonie et la Cedeao, l’Europe et l’Amérique, tous ceux qui ont les moyens (et la volonté) d’aider les Togolais à éviter la guerre de succession qui les menace ont condamné le coup de force par lequel une partie des prétendants au pouvoir l’a préempté.
C’est nécessaire et c’est très bien, mais cela ne suffit pas. Ils devraient, à mon avis, recommander ce partage du pouvoir à « la classe discutante » togolaise et, au besoin, le lui imposer.
C’est à ce prix qu’on évitera au Togo de sombrer dans la guerre civile et d’entraîner la région vers encore plus d’instabilité.

*Les quinze pays constituant l’Afrique de l’Ouest sont les suivants (pour chacun, la population est indiquée entre parenthèses et en millions d’habitants) : Bénin (7), Burkina Faso (12), Cap-Vert (0,5), Côte d’Ivoire (17), Gambie (1,5), Ghana (20), Guinée (8), Guinée-Bissau (2), Liberia (3,5), Mali (11,5), Niger (11,5), Nigeria (133), Sénégal (10), Sierra Leone (5), Togo (5).

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