Ne nous parlez pas de Darwin !
Publié le 13 février 2005 Lecture : 2 minutes.
Des étudiants marocains de l’université d’Amsterdam ont refusé, la semaine dernière, que le professeur de biologie donne un cours sur la théorie de l’évolution. Ils n’ont pas engagé une discussion sur la validité scientifique du darwinisme. Non : ils ont tout simplement refusé que le cours soit donné, puisqu’il contredit, selon eux, leurs opinions religieuses.
Quelques enseignants ulcérés proposent maintenant de faire porter toutes les questions de l’examen de fin d’année sur Darwin. Ou bien les étudiants récalcitrants sont incapables d’expliquer quelle est cette théorie qu’ils rejettent a priori, et alors ils auront un zéro pointé. Ou bien ils sont capables d’en donner les grandes lignes, et ils auront la moyenne. Ou bien ils exposent le darwinisme et, en plus, ils le réfutent scientifiquement. Ceux-là, il faut leur donner vingt sur vingt, mais aussi alerter toutes les revues scientifiques du monde…
L’incident a connu un développement inattendu. Certains chrétiens fondamentalistes se réjouissent, sans trop le dire, de la campagne anti-Darwin des étudiants marocains. Ils croyaient avoir perdu la bataille depuis longtemps, puisque tous les enseignants et les chercheurs admettent l’évolution des espèces. Adam et Ève, c’est une métaphore ; le serpent n’a pas vraiment bavardé avec Ève, ni en hébreu ni en néerlandais. Cependant, il reste un petit noyau de fondamentalistes chrétiens pour qui l’apparition à l’université d’un bataillon obscurantiste descendu du Rif – sans passer par le singe – est une divine surprise. On voit ainsi se dessiner une Sainte-Alliance entre bigots des deux bords.
Les autorités se réjouissaient de voir les jeunes d’origine étrangère prendre le chemin de l’université. Aujourd’hui, ce sentiment a laissé place au doute. A-t-on laissé entrer un cheval de Troie (ou un chameau de Riyad) dans les murs de la forteresse du savoir ? Voilà qui ne contribue pas à rendre les Marocains populaires dans un pays qui compte une bonne douzaine de Prix Nobel en physique, en chimie et en médecine. Et comme il n’y a pas de prix Nobel de la niaiserie, on se demande bien à quoi servent ces antidarwiniens plus bornés qu’une mule – leur cousine.
