Cacophonie européenne

Publié le 13 février 2005 Lecture : 2 minutes.

Le débat sur l’immigration revient en force sur la scène politique européenne après l’ouverture, le 7 février et pour une durée de trois mois, d’un processus exceptionnel de régularisation des sans-papiers en Espagne. Destiné à « faire affleurer l’économie souterraine et mettre un terme aux coûts sociaux que provoque le travail clandestin », il concernera entre 500 000 et un million d’étrangers. L’opération (la dernière du genre avait eu lieu en Italie, en 2003) suscite des grincements de dents dans plusieurs pays européens, car, une fois détenteur d’un permis de séjour espagnol, un immigré a le droit de circuler librement entre les vingt-cinq pays membres. Les Européens ont créé un espace de libre circulation, sans pour autant se doter de procédures communes d’admission des immigrés.
C’est pourtant une nécessité pressante à l’heure où l’Europe est confrontée à des flux massifs de clandestins, au vieillissement de sa population et à des pénuries de personnels spécialisés. « Il y aura 20 millions de travailleurs en moins en Europe dans les vingt prochaines années », a déclaré, le 9 février, le commissaire européen au Travail et aux Affaires sociales, Vladimir Spidla. Le 11 janvier, la Commission a publié un « livre vert » encourageant les Vingt-Cinq à définir certains critères communs pour gérer l’immigration économique. Plusieurs pays se dirigent déjà vers l’adoption de politiques très sélectives. Au Royaume-Uni, le gouvernement de Tony Blair a présenté, le 7 février, un plan prévoyant la mise en place d’un système de points (fondé notamment sur l’âge et les compétences) pour sélectionner les candidats. « Nous devons nous assurer que nous laissons seulement entrer les immigrés ayant les compétences et les talents utiles à la Grande-Bretagne et que nous arrêtons ceux qui seraient des charges pour la société », a déclaré Charles Clarke, le ministre britannique de l’Intérieur. En France, le ministre de l’Intérieur Dominique de Villepin préconise également une immigration « choisie » tout en refusant l’idée de quotas par nationalités défendue par son prédécesseur Nicolas Sarkozy. Le 7 février, lors d’un séminaire gouvernemental sur l’attractivité en France, le Premier ministre Jean-Pierre Raffarin a retenu trente-cinq mesures pour attirer étudiants, cadres et artistes étrangers (allant de solutions pratiques pour l’installation des étudiants à la simplification des procédures administratives et fiscales pour les hommes d’affaires). En Allemagne, le pays a déjà institué, en 2000, des « cartes vertes » pour encourager la venue d’informaticiens indiens et pakistanais.

Reste à savoir si un choix qui consiste à faire venir une personne et à la renvoyer chez elle dès lors qu’elle n’est plus jugée « utile » est humainement acceptable. Et à consentir au pillage des cerveaux que supposent de telles politiques. Car, c’est certain, elles ne feront qu’aggraver l’indigence des pays du Sud, privés de leurs élites, et ne changeront rien à l’afflux massif d’immigrants clandestins vers les pays riches.

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