Vos lettres et emails sélectionnés

Publié le 12 décembre 2004 Lecture : 6 minutes.

L’UA n’est pas à la hauteur
En s’alignant derrière la France pour sanctionner la Côte d’Ivoire, les Africains ont donné l’image d’un groupe hétérogène de vassaux, aux intérêts divergents et soumis aux ordres de l’homme blanc de l’Élysée. Ce n’est pas parce qu’ils sont contre Gbagbo ou contre la Côte d’Ivoire que les Africains ont voté l’embargo, mais parce qu’ils n’ont ni le courage, ni la détermination de dire à laFrance : « ça suffit ! Vous ne pouvez pas reconnaître un président élu et, ensuite, lui imposer de discuter avec des rebelles. » Combien d’hommes d’État accepteraient les concessions demandées à Gbagbo ? Même en France des voix s’élèvent pour dénoncer les ambiguïtés des accords de Marcoussis et les exactions de l’armée française en Côte d’Ivoire.
La crise ivoirienne a permis de juger de la capacité et du poids de l’Union africaine dans le concert des nations. Si l’UA était à la hauteur des espoirs du peuple africain, elle chercherait plutôt à savoir comment un jeune à peine sorti de l’université a pu se doter d’armes de guerre pour défier le pouvoir en place. Elle chercherait à savoir quelles puissances se cachent derrière cette rébellion, quels sont leurs relais en Afrique, et à trouver des voies diplomatiques et politiques pour signifier que l’époque des coups d’État est révolue. Malheureusement il n’en est rien.

Marre de l’ethnocentrisme !
Je suis indigné par l’ethnocentrisme occidental. Je trouve injuste que l’on fasse un scandale international de la mort de huit soldats français en Côte d’Ivoire alors que l’on entend à peine parler de celle de dizaines de civils ivoiriens. De même que l’on entend toujours parler du 11 septembre 2001 qui a fait quelque 3 000 morts alors que le million de Rwandais assassinés durant le génocide de 1994 n’est que rarement mentionné dans les médias.

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Sincères condoléances
J’ai été désolé d’apprendre le décès de votre très respecté collaborateur Paul-Marie de La Gorce. Permettez-moi d’adresser à toute l’équipe de Jeune Afrique/l’intelligent et, à travers elle, à sa famille mes sincères condoléances.

Indépendance sous surveillance
La présence des troupes françaises en Côte d’Ivoire et ailleurs en Afrique pose la question de l’indépendance réelle de nos pays. Cependant, ces forces ont toujours arrangé nos hommes politiques. S’il avait gagné son combat contre la rébellion, Laurent Gbagbo aurait sûrement proclamé sa victoire à partir de l’Ambassade de France sous la protection de ces mêmes forces qu’il dénigre aujourd’hui. Quoi qu’il en soit, le départ de ces troupes doit se faire après des élections démocratiques, ouvertes et transparentes et non sur le coup de tête de dirigeants qui du jour au lendemain se sentent investis d’une sorte de mission divine, inspirée par un africanisme totalitaire. Il est indéniable que nous avons beaucoup de choses à nous reprocher dans cette « indépendance sous surveillance » que nous vivons, et cette part de responsabilité à pour noms, entre autres, laxisme, corruption et incompétence.

Chapeau à François Soudan
Je viens de lire l’enquête de François Soudan dans J.A.I. n° 2291 : « France-Côte d’Ivoire : le piège et la faute ». J’ai eu, en découvrant le fruit de son travail, le même réconfort, la même satisfaction intellectuelle qu’en lisant récemment, dans Libération, « Journalistes en uniforme » de Daniel Schneiderman.
Dans ce contexte mondial où il est de plus en plus difficile de nier les voies d’eau qui menacent l’indépendance de la presse, il est encourageant de voir des plumes libres de toute instrumentalisation nous replonger dans les missions premières de la presse, ultime rempart des libertés.
La relation des événements qui ont suivi le bombardement de la cible Licorne à Bouaké, les projections par rapport à la nature et au bien-fondé de la riposte, les conséquences tirées quant à l’éveil du nationalisme africain et à l’avenir des relations franco-africaines sont à mettre au crédit du journalisme et de l’intellectuel honnête dans la tradition des encyclopédistes.
Il y a en effet longtemps, trop longtemps, que des voix s’élevaient pour dénoncer certains silences médiatiques par rapport à la Côte d’Ivoire. L’application à qualifier la crise d’ivoiro-ivoirienne en dépit de ses manifestations sous-régionales avait quelque chose d’aliénant. La condamnation certes normale et légitime des médias de la haine, mais de façon sélective (pour voir en la partie gouvernementale, et en elle seule, le mal absolu), a rendu beaucoup de personnes perplexes.
François Soudan, à la suite de Canal Plus, a donné des raisons d’espérer en dépeignant sans parti pris et comme le faisaient les grands lauréats du Pulitzer ce qui s’est réellement passé à Abidjan.
Je tenais à lui dire tout simplement : chapeau !

Critiquer pour suggérer
La critique est une bonne chose, faire des suggestions en est une autre. Pour ma part, une critique qui n’est pas suivie d’une ou de plusieurs suggestions est caduque. Plusieurs de vos lecteurs comparent la situation actuelle de la Côte d’Ivoire à celle du Rwanda, il y a dix ans. Peut-être ont-ils oublié que ce dont la Côte d’Ivoire a besoin, c’est d’issues de sortie de crise et non de comparaisons.

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Flaubert ou Hemingway ?
La crise de la recherche scientifique française est une preuve que la France n’est plus une locomotive mais un wagon. La Francophonie régresse partout dans le monde et l’Hexagone n’a plus de poids politique sur le plan international. Le chauvinisme français est également insupportable : dans les aéroports, les pilotes de ligne français refusent toujours de communiquer en anglais avec les tours de contrôle au risque de malentendus et de collisions. Ce sentiment découle-t-il du fait que nous, Tunisiens, avons été colonisés par la France ? Ou alors de la vision de cette queue interminable qui s’étire devant l’ambassade de France à Tunis ? Des mauvais traitements que subit la diaspora arabe au pays des Lumières ? À propos, cessons de vanter le pays des droits de l’homme : tout cela n’est plus, et le Royaume-Uni est très loin devant dans le domaine des libertés civiles.
Regardez encore l’industrie française, automobile, pétrolière, cinématographique : elle périclite. Les Français sont également en queue de liste dans le domaine d’Internet et des nouvelles technologies de l’information. Tout cela pour dire que nous ne regardons plus la France comme une terre riche d’opportunités, et que nous sommes désormais aptes à ne compter que sur nous-mêmes ! Malgré tout, je souhaite bien sûr visiter l’Hexagone, première destination touristique mondiale et qui possède une vraie civilisation contrairement au pays de l’Oncle Sam sans histoire ni racines. Mais si vous voulez mon avis, oubliez Flaubert et lisez Hemingway !

Vous avez dit radical…
Dans l’article intitulé « France-Côte d’Ivoire : le piège et la faute », signé de François Soudan et paru dans le J.A.I. n° 2291, on peut lire : «… Le second DVD, intitulé La guerre des 6 jours de la France contre la Côte d’Ivoire est nettement plus militant. Y apparaissent des personnages comme Jules Yao Yao, Pascal Affi Nguessan, Mamadou Koulibaly – tous connus pour leur radicalisme… ». Je proteste contre ce jugement injuste et sans appel. Je ne me reconnais pas dans un quelconque radicalisme, étant notoirement connu pour ma pondération et mon sens de la mesure.

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La dette étouffe l’Afrique
Dix-neuf pays, parmi les plus riches, se sont récemment mobilisés pour discuter de l’avenir de l’Irak et accepter, à l’unanimité, d’effacer la dette du pays, sinon de la diminuer sensiblement de 80 %. Un geste remarquable et que nous saluons tous, surtout que l’Irak est victime d’une guerre injuste et répugnante. Mais à quand l’Afrique ? Nous attendons depuis des lustres cette générosité qui ne vient pas. Les sacs de riz et les boîtes de conserve largués à partir des avions onusiens au Darfour ou par les soldats de la Monuc au Congo, c’est bien beau mais malheureusement insuffisant ! L’Afrique a besoin de plus que de mansuétude. Nous avons été pillés, spoliés, emprisonnés par ce système de dette (avec des profits léonins), au point d’en être dangereusement fragilisés. La dette est un corset qui étouffe l’Afrique. Justice doit être rendue. Cela permettrait au continent de repartir sur des bases nouvelles.

Les Français et les autres
Autant je suis solidaire des deux journalistes français retenus depuis plus de cent jours en Irak, autant je trouve inadmissible que la plupart des médias, surtout français, ne parlent pratiquement que d’eux. Il suffit d’écouter le journal de RFI pour s’en rendre compte. Combien sont-ils, simples routiers, paisibles travailleurs encore retenus en Irak et depuis combien de temps ? Les journalistes ne sont-ils pas obligés de défendre tout le monde sans distinction ?

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