L’équipe du président

Publié le 12 décembre 2004 Lecture : 3 minutes.

Thabo Mbeki est un homme secret. Sa préférence pour un kitchen cabinet plutôt que pour les réseaux de pouvoir institutionnels est connue de ses compatriotes, et agace souvent jusqu’au sein de l’ANC. Le dossier ivoirien n’échappant pas à la règle, Mbeki a demandé à trois proches collaborateurs d’en faire leur affaire.

Mojanku Gumbi
Une juriste de choc
Ironiquement surnommée la « Condoleezza Rice de Mbeki » (jusqu’à ce que cette dernière prenne la tête du département d’État américain), Mojanku Gumbi travaille dans l’ombre de Mbeki depuis 1994, sous le titre officiel de « conseillère juridique » et dans le rôle officieux de « bras droit ». Très engagée sur la question des Noirs et des femmes, cette avocate la seule femme qui a plaidé à la Cour suprême de Pretoria sous l’apartheid est entrée en politique après avoir été remarquée par Mbeki pour son rôle à la Commission électorale indépendante en 1994. Née et élevée dans un milieu rural pauvre, cette femme de pouvoir, dure mais charmante et surtout influente, s’intéresse de près aux questions internationales. Amie du président, chez qui elle passe certains week-ends et dont elle apprécie l’humour, Mojanku Gumbi est l’une des rares à pouvoir lui parler directement et régulièrement. Fidèle du président, elle a été au centre du Dialogue intercongolais et des négociations dans les Grands Lacs; elle s’est également rendue en Haïti en 2003 et apprécie particulièrement le Zimbabwe, dont elle aime les habitants. Si elle ne participe pas régulièrement au Conseil des ministres, elle est au courant des sujets qui y sont discutés bien avant. Mais, bien que membre de l’Azapo (le mouvement du Black Consciousness), elle n’interfère pas dans les questions de l’ANC. Elle a hérité du
dossier Côte d’Ivoire dès que son mentor en a pris la charge dans le cadre de la médiation de l’UA.

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Aziz Pahad
L’ami de la fac
Le vice-ministre des Affaires étrangères est un proche du chef de l’État. Reconduit pour la troisième fois consécutive à ce poste au lendemain des élections d’avril 2004, Aziz Pahad a d’autant plus la confiance de Mbeki que son frère, Essop, est ministre à la présidence. Nommé pour la première fois en 1994 par Nelson Mandela, il est considéré aujourd’hui comme l’un des meilleurs diplomates sud-africains et, sans conteste, le meilleur analyste de la politique internationale de son pays.
Bien plus influent que certains de ses collègues, mieux placés dans la hiérarchie du gouvernement, cet « Indien » ne vit que pour la diplomatie et est intarissable sur la question du mur israélien ou la guerre en Irak. Exilé à partir de 1964, il a rencontré Mbeki à l’université de Sussex. Leur amitié et leur confiance remontent à cette période.
C’est lui qui s’est rendu auprès de Saddam Hussein, à l’aube de l’intervention américaine, pour lui demander de céder aux inspecteurs des Nations unies, lui encore qui a
rencontré les factions rivales lors du Dialogue intercongolais, lui toujours qui a été rendre visite à Jean-Bertrand Aristide en Centrafrique avant que celui-ci ne soit accueilli à Pretoria. Selon Pahad, il relève de la « responsabilité de l’Afrique du Sud, ce grand pouvoir », de contribuer à régler les problèmes de l’Afrique et du monde. En Côte d’Ivoire, ce sera l’occasion, pour lui, de prouver ce dont les Sud-Africains sont capables.

Mosiua Lekota
Le « garde du corps »
Véritable « second » pour les uns, « garde du corps » de Mbeki pour les autres, Mosiua Lekota est ministre de la Défense depuis 1999. Celui qu’on surnomme gentiment « la Terreur » pour son jeu de jambes au football était leader de l’association des étudiants sud-africains (Saso) en 1973-1974, à la pointe de la lutte contre l’apartheid. Ce qui lui a valu huit ans de prison à Robben Island. Il aurait été choisi par Mbeki pour s’occuper du dossier ivoirien à cause de sa disponibilité et de la nécessité, au début de la médiation sud-africaine, de comprendre la crise d’un point de vue militaire. Conscient que le conflit ivoirien ne se réglera pas en quelques jours, Mbeki a tenu à avoir à ses côtés des officiels qui pourraient, à l’avenir, y consacrer du temps, à l’inverse de la ministre des Affaires étrangères, Nkosazana Dlamini-Zuma, toujours en voyage et déjà engagée sur d’autres fronts, dans d’autres régions. Sans compter que l’éventuelle participation de troupes africaines au maintien de la paix en Côte d’Ivoire pourrait concerner au premier chef le ministre de la Défense d’un pays qui devrait y contribuer
largement.

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