Fatigue ukrainienne

Publié le 12 décembre 2004 Lecture : 2 minutes.

Franchement – on est entre nous, on peut tout se dire -, l’Ukraine, ça vous intéresse vraiment ? Et d’abord, vous vous y retrouvez, vous, entre Kouchma, Yushchenko et Yanukovich ? Ou est-ce Yanuchenko et Yushkovich ? On s’y perd, on ne sait plus, on abandonne. Autour de moi, je ne connais personne qui se jette sur la presse pour savoir ce qui se passe à Kiev, personne qui se lève aux aurores pour suivre à la radio les tribulations ukrainiennes. Affalé sur mon sofa, l’oeil mi-clos, le cerveau éteint, la seule pensée que suscitent en moi les images du pauvre Yushmachin, avec sa face verdâtre dévorée par les pucerons, c’est que l’Ukraine n’a pas inventé Clearasil.
Tenez, même les Arabes, les champions du monde de la théorie du complot, sont complètement apathiques. On a beau surfer sur Internet, pas un seul Hamid pour clamer que Yushtruc a été empoisonné par les Kurdes ou les chiites, pas un seul Rabah pour affirmer qu’il s’agit d’un coup de la conspiration kabylo-sioniste-fraise-des-bois.
Pourtant, les Ukrainiens, peuple fier et courageux à la culture millénaire – je dis ça au hasard, n’ayant pas d’encyclopédie sous la main -, méritent tout autant notre intérêt que les Ivoiriens ou les Kényans. Alors, pourquoi ce désintérêt ? Comment expliquer cette fatigue ukrainienne ?

Je crois que c’est à force de vivre le cycle émeute/révolution/état de grâce/désillusion, qui semble être une caractéristique du XXe siècle, que nous sommes devenus cyniques. Vous souvenez-vous des Allemands de l’Est se précipitant en 1989 à Berlin-Ouest pour dévorer des bananes et zyeuter des films cochons ? Les mêmes veulent aujourd’hui rebâtir le Mur. Vous vous rappelez les Roumains massacrant Ceaucescu et sa sinistre Elena ? Aujourd’hui, ils votent communiste. Alors, à quoi bon ? Quel que soit le vainqueur, Youchouchou de Bruxelles ou Yanukoko de Moscou, dans deux ans tout le monde réclamera le retour de Staline.
De plus, il paraît que Yush, le soi-disant libéral pro-occidental, est tout autant nationaliste que son rival prorusse : dans les deux camps, on trouve des skinheads xénophobes et antisémites. Bref, les Ukrainiens semblent avoir le choix entre la peste et la petite vérole. On a du mal à s’enthousiasmer.

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