Quand l’Afrique réplique à Sarkozy
Plusieurs historiens ont déjà réagi au très controversé « discours de Dakar » prononcé le 26 juillet 2007 par le président français Nicolas Sarkozy, de l’ancienne ministre malienne Aminata Traoré (L’Afrique humiliée) à Jean-Pierre Chrétien (L’Afrique de Sarkozy, un déni de l’Histoire). Adame Ba Konaré, épouse de l’ancien chef de l’État malien et elle-même historienne, n’y est pas étrangère.
Le 14 septembre 2007, elle avait lancé un appel à l’ensemble de ses collègues afin de tordre le coup aux idées « étonnamment statiques » véhiculées par le chef de l’État français. « Nous avons la charge de gérer la mémoire du continent, nous devions réagir », explique-t-elle. Sur le site créé pour l’occasion (memoireafrique@yahoo.fr), les réponses ont afflué. Par milliers. Parmi ses correspondants, beaucoup d’enseignants et d’intellectuels, bien sûr, mais surtout « d’innombrables et émouvants anonymes désireux de mieux connaître l’histoire de l’Afrique ».
De cette mobilisation, et à la demande de François Gèze, directeur des éditions La Découverte, est né un livre, Précis de remise à niveau sur l’histoire africaine à l’usage du président Sarkozy, qui, préfacé par Elikia M’Bokolo, réunit les contributions de divers auteurs, comme l’anthropologue française Catherine Coquery-Vidrovitch, l’historien malien Drissa Diakité ou l’archéologue, malien lui aussi, Kléna Sanogo.
Adame Ba Konaré, épouse de l’un des rares responsables africains à avoir osé critiquer la harangue sarkozienne, s’y livre pour sa part à un réquisitoire didactique et dépassionné qui démonte point par point les thèmes évoqués par le président français, comme l’anhistoricité des sociétés africaines ou les apports positifs de la colonisation.
L’ouvrage, qui sort en France le 16 octobre, ne s’intitule pas « L’Afrique pour les nuls » (formule popularisée par la célèbre collection First), mais c’est tout comme. Il s’adresse en priorité au grand public et aux esprits « qui pèchent par méconnaissance ou préjugés ». Préjugés tenaces fondés sur des connaissances anthropologiques d’un autre âge que certains milieux politiques continuent néanmoins de relayer. Henri Guaino, le conseiller de Nicolas Sarkozy, qui est comme chacun sait le véritable auteur du discours de Dakar et dont les relations avec l’auteur du livre sont notoirement exécrables, est à l’évidence de ceux-là. Et c’est à lui que ce livre s’adresse en premier lieu.
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