Aux voleurs !

Publié le 12 octobre 2008 Lecture : 2 minutes.

Je jubile ! Je me marre ! En ce moment où la situation économique est au plus bas, je suis au top. Je ne me soupçonnais pas une telle passion pour l’économie. Ni qu’elle pouvait me tenir en haleine, mieux qu’un roman policier. J’ai laissé tomber les choses de la culture et les trémolos de l’art, que je trouve insipides à côté de l’actualité palpitante que nous offre la situation financière, faussement qualifiée de « mondiale » : crise, effondrement, remontée, descente aux enfers
Ces grandes tours de verre sombres, tels des ventres de boas qui, tout à coup, livrent leurs secrets. Pour la première fois, j’ai vu à la télé de gros financiers qui se rongeaient les ongles : normal, ils n’ont plus le temps pour la manucure. J’ai vu Bush, le pas plombé et l’il plus inquiet que pendant le bombardement de l’Irak où il jouait allègrement avec ses chiens, je m’en souviens très bien. Moi, je suis contente de voir Bush inquiet, pour une fois. Même si c’est pour une vulgaire question de sous. Et Sarko qui ne sait plus sur quel pied danser ! Il faut punir le financier Ryan, somme-t-il. Il faut sévir contre les criminels du magot.
Et les traders, quelle jeunesse stressée au combiné plus proche du cur que la veine jugulaire, parole du Coran ! Je la croyais légère et libertine, la jeunesse, et là voilà minée par la peur du krach. J’ignorais qu’elle était si accro à l’argent, je lui donnais le bénéfice de l’amour. Des petits commerçants de pacotille, ces golden boys ! Et puis ces ouvriers indiens qui, de dépit, ont haché menu leur patron sous prétexte qu’il les payait mal. Vous me voyez, moi, entrer dans le bureau de mon rédac’ chef armée d’une hache ? Même avec une babouche, je ne pourrais pas !
En revanche, j’ai poussé la porte du bureau de mon banquier. Il avait l’air penaud, c’est si rare. J’ai dit : « Je vous ferais bien l’affront de retirer mon argent, sauf que je n’ai pas d’argent. » Oui, je l’aurais menacé, lui qui ne manque pas de me sermonner quand je suis dans le rouge, et je le suis souvent.
Dans cette trame tragi-comique, il y a aussi les personnages que j’aime. Ceux qui dament le pion à l’Amérique, « Chávez et la compagnie latino », qui savent le mieux faire chanter l’Oncle Sam en ce moment. Oh ! comme j’aurais voulu être brésilienne, ou chilienne, ou argentine. Ils ont hérité du fameux nif algérien, ces Latinos. Ce nif que les Arabes ont perdu sans pour autant emporter la bataille des barbes. Mais bon, ce n’est pas grave, je ne me plains pas trop. Je suis du côté des pays dits « émergents » qui regardent le monde gesticuler sans trop s’inquiéter : on ne peut pas perdre quand on ne ramasse que des miettes au banquet occidental.
Croyez-moi : il n’y a pas époque plus heureuse, plus gaie et plus marrante pour tous ceux qui, comme moi, n’ont pas le sou. Profitez-en, et vite. Les voleurs ne tarderont pas à revenir.

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