« Notre objectif, c’est d’abord la justice »

Les deux « héroïnes » du film, la juge Béatrice Ntuba et la procureure Véra Ngassa, tirent les enseignements de cette expérience.

Publié le 12 mars 2006 Lecture : 2 minutes.

Jeune Afrique : Pensez-vous que le fait que vous soyez des femmes influe sur votre façon de rendre la justice et de faire votre métier ?
Béatrice Ntuba : Il est vrai que, normalement, les relations entre le juge et le procureur de la République ne sont pas aussi harmonieuses qu’elles le sont entre nous. Parce que nous sommes toutes les deux des femmes, nous avons une histoire commune, et nous partageons le même intérêt pour la justice.
Véra Ngassa : Notre objectif, c’est d’abord la justice. Si un homme mérite que justice lui soit rendue, nous la lui rendons. Chacun a ses droits et sa dignité. Ce qui est sûr, c’est que le fait que nous soyons des femmes, et pas seulement nous deux, mais aussi la commissaire de police, rassure les plaignantes. Elles se sentent plus à l’aise pour parler des choses qui touchent leur vie personnelle.
Ne prenez-vous pas plus facilement parti pour les femmes ?
Béatrice Ntuba : En tant que juge, mon travail n’est pas de détruire les foyers ou les mariages. Il faut trouver l’équilibre entre la punition et la préservation des familles. Véra Ngassa : Les gens ne connaissent absolument rien de leurs droits et de la manière dont fonctionne la justice. Nous devons instruire autant les victimes que les accusés. Il faut absolument expliquer à ceux que nous condamnons ce qu’ils ont fait de mal.
La présence de la caméra n’a-t-elle pas perturbé votre travail quotidien ?
Véra Ngassa : Le fait que l’équipe de tournage était entièrement féminine a probablement facilité les choses. Les victimes qui venaient dans mon bureau ou au tribunal se sentaient en confiance du fait que Kim était aussi une femme. Je pense même que la présence de l’équipe lors de la prononciation du divorce d’Amina devant le tribunal traditionnel a pesé sur la décision favorable à son égard. De son côté, Amina s’est sentie soutenue par la présence de la caméra. Et puis, au bout de quelques jours, on oublie que la caméra est là !
Quel a été l’impact de ce documentaire sur votre travail ?
Véra Ngassa : Pour moi, cela a été une révélation. J’ai d’abord découvert qu’un documentaire n’est pas quelque chose d’ennuyeux. Ensuite, cela a représenté une sorte d’appréciation sur ce que nous faisons dans notre travail quotidien. Cela nous a donné de la force pour continuer.
Béatrice Ntuba : Je pense que ce film a aussi un impact positif sur l’image du Cameroun. Pour une fois qu’on ne parle pas de corruption, qu’on ne donne pas une image négative du pays. Grâce à ce documentaire, c’est une meilleure image de l’Afrique qui est véhiculée. Véra Ngassa : J’espère que ce film encouragera encore plus de femmes camerounaises à faire ce métier. Lorsque j’étais enfant, j’ai lu Ne tirez pas sur l’oiseau moqueur de l’écrivain américain Harper Lee, qui raconte l’histoire d’un avocat du sud des États-Unis qui défend un Noir injustement accusé de viol. C’est à partir de ce moment que j’ai su que je serais avocate. Ce film pourrait avoir la même influence.

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