Diarra : « J’ai fait ce que j’ai pu. »
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Il s’en est allé comme il était arrivé et de la même façon qu’il a exercé, presque trois années durant, le dur métier de Premier ministre de la Côte d’Ivoire : avec discrétion, avec tact, presque sur la pointe des pieds. Sur un coin de son bureau est posée une belle lettre datée du 6 décembre et signée Jacques Chirac, dans laquelle le président français rend hommage à son « patriotisme » et à son « sens du devoir ». « Un message très réconfortant », confie-t-il à J.A.I., avant de préciser qu’il n’en dira pas plus sur son contenu, « afin de ne gêner personne ». Ainsi est Seydou Elimane Diarra, 72 ans : d’une courtoisie aussi exquise que rédhibitoire dans ce monde de brutes qu’est celui de la politique ivoirienne. À ceux qui lui font grief d’avoir déçu les espoirs placés en lui, faute de s’être imposé face à Gbagbo et aux chefs de l’opposition, Diarra répond avec une pointe de lassitude : « J’ai fait ce que je pouvais faire, j’ai tenu à ce que ce pays ne sombre pas dans la guerre. » Tout de même, n’a-t-il pas l’impression que le chef de l’État ne lui a guère facilité la tâche ? Réponse, en forme de question, de l’intéressé : « Pourquoi voulez-vous que je vous confirme ce que vous savez déjà ? » Mais enfin, pourquoi, au lieu de menacer à plusieurs reprises et sans résultats de remettre sa démission – au point d’agacer souverainement le médiateur Thabo Mbeki, ses amis français et la plupart des voisins de la Côte d’Ivoire -, n’a-t-il pas mis à exécution sa menace ou, à tout le moins, tapé du poing sur la table ? Réponse, une nouvelle fois interrogative : « Vous croyez que cela se passe comme ça ? Vous imaginez un Premier ministre français saisir au collet le président Chirac pour l’obliger à signer un décret ? Ces histoires de poigne ou de poing, ça n’a aucun sens. »
Même s’il se dit, au détour de la conversation, « sceptique, pour ne pas dire plus », quant aux perspectives d’un déroulement normal du processus électoral en 2006, et même si on le sent meurtri par les critiques formulées à son encontre « par tous ceux qui pensent que la Côte d’Ivoire est un bantoustan » (suivez son regard en direction de Mbeki et des Sud-Africains), Diarra se refuse à polémiquer. Par nature, sans doute, mais aussi parce que cet ingénieur agronome, qui fut ambassadeur et homme d’affaires prospère avant de devenir le Premier ministre de Robert Gueï, puis de Gbagbo, a un projet en tête. Après quelques semaines de repos à Dakar, à Abidjan et en Europe, il compte s’attaquer à la rédaction de ses Mémoires. « C’est fou ce que vous y apprendrez », promet-il. Mais elles ne paraîtront pas avant l’échéance fatidique du 31 octobre 2006. Sans doute, une fois de plus, « pour ne gêner personne ». Ainsi est Seydou Elimane Diarra…
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