Chose promise, chose due…

Publié le 11 décembre 2005 Lecture : 3 minutes.

Il reconnaît lui-même avoir eu le trac. Mais le président comorien peut être soulagé. À l’issue du grand oral qu’il a passé le 8 décembre à Maurice face à la communauté internationale, Azali Assoumani s’en tire avec la mention « bien ». Sur les 300 millions de dollars que Moroni doit mobiliser pour financer le développement du pays sur la période 2006-2009, les deux tiers sont déjà acquis.
Organisée sous la présidence du Premier ministre mauricien Navinchandra Ramgoolam et du président sud-africain Thabo Mbeki, la conférence des bailleurs de fonds en faveur des Comores, qui s’est tenue au Centre de conférences internationales de Grand-Baie, à Maurice, est donc un franc succès : 21 pays et 28 organisations internationales y étaient représentés, dont l’Union africaine, l’Union européenne et l’Organisation internationale de la Francophonie, toutes trois très actives dans la résolution de la crise comorienne. Mais ce succès n’est pas une performance pour autant. Comme l’a souligné Thabo Mbeki en guise de préambule, « les Comores ne demandent pas beaucoup. Et si nous ne sommes pas capables d’aider un pays peuplé de seulement 576 000 habitants, cela voudra dire que l’avenir de l’humanité est vraiment très sombre. »
Plus précisément, cette rencontre, attendue depuis 2001 par les dirigeants de l’archipel, a permis de mobiliser de la part des donateurs un montant en espèces estimé à 140 millions de dollars. Ce à quoi il faut ajouter les contributions en nature d’autres participants qui se sont engagés à intervenir dans différents programmes de développement en renforçant les capacités des institutions par la formation et l’assistance technique. Particulièrement médiatisé par ses organisateurs, ce type de conférence vise généralement à financer la reconstruction d’un pays en situation postconflit. Pour avoir tous trois connu des troubles civils ou militaires au cours des dernières années, la RD Congo, le Burundi et Madagascar ont bénéficié d’une grand-messe destinée à mobiliser la communauté internationale. Les Comores, certes, ne sont pas en situation d’après-guerre, mais le pays revient de loin. Lorsque, en août 1997, les séparatistes d’Anjouan proclament unilatéralement l’indépendance de leur île, le pays est au bord de l’implosion. Durant de longs mois, l’archipel va traverser une crise apparemment insoluble. Au terme d’un laborieux processus, les Comores se sont dotées de nouvelles institutions et l’archipel est toujours uni. Mais la crise a laissé des cicatrices.
Pour tenter de les effacer, la communauté internationale a donc décidé de mettre la main à la poche. Avec plus ou moins de générosité. Au nom de la France, Pierre-André Wiltzer, haut représentant pour la sécurité et la prévention des conflits, a annoncé une contribution substantielle de 65 millions d’euros pour la période 2006-2009, soit une augmentation de plus de 60 % de l’aide française aux Comores par rapport aux trois dernières années. Mais si les promesses se sont multipliées au cours de la conférence, Moroni ne touchera pas pour autant un chèque en blanc. Tout d’abord, les ambitions comoriennes devront être sinon revues à la baisse, tout au moins rationalisées. Ainsi, le directeur des opérations de la Banque mondiale dans l’océan Indien, James Bond, a souligné que le plan de réduction de la pauvreté proposé par Moroni était « probablement trop ambitieux, notamment au vu des capacités de mise en oeuvre des programmes et d’absorption de l’aide, relativement limitées, des Comores ».
Dans un second temps, cet effort des donateurs en faveur de la réconciliation nationale ne sera effectif que si le processus en cours va jusqu’à son terme. La plupart des participants ont d’ailleurs insisté sur la nécessité pour le gouvernement comorien d’organiser l’élection présidentielle d’avril 2006 dans les délais prévus par la loi. Et en toute transparence. Un scrutin particulièrement sensible dans la mesure où la présidence de l’Union des Comores doit obéir à une rotation entre les trois îles qui la composent. Élu en avril 2002 à la tête du pays, le colonel Azali Assoumani, originaire de l’île de Grande Comore, cédera donc son fauteuil à un candidat d’Anjouan, et une « primaire » devra permettre aux Anjouanais de choisir les trois meilleurs candidats issus de leur île. Une perspective qui suscite la défiance de certains sur la Grande Comore, où l’on craint de remettre le destin de l’archipel entre les mains d’une personnalité issue d’une île longtemps suspectée de velléités séparatistes. Quoi qu’il en soit, le président Azali est catégorique : l’élection se tiendra dans les temps. Dans le cas contraire, les promesses des bailleurs de fonds risqueraient de rester lettre morte.

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