Dossier assurances : les tactiques gagnantes des assureurs
L’émergence d’une classe moyenne ouvre de nouvelles perspectives de croissance aux compagnies du continent. Analyse des tactiques gagnantes.
Assurances : des produits qui assurent
Globalement, 2012 aura été une bonne année pour les assureurs africains. En attendant la publication imminente des derniers chiffres de la Fédération des sociétés d’assurances de droit national africaines (Fanaf), les professionnels sont confiants. Activa table sur une progression d’environ 13 % de son chiffre d’affaires au Cameroun, et Axa Gabon de 14 %. Alors qu’au niveau mondial le secteur a connu un ralentissement l’an dernier, voire un recul (- 0,4 % dans les pays développés), le rapport Sigma 2012 du réassureur helvétique Swiss Re estime qu’il a affiché une progression de 3,2 % sur le continent. Et au sud du Sahara, les primes collectées par les compagnies d’assurances entre 2000 et 2011 ont augmenté de 7,1 % par an, pour atteindre 8,9 milliards de dollars (6,63 milliards d’euros).
Première raison de cette croissance soutenue : le décollage de l’assurance santé. Longtemps parent pauvre de la profession, cette activité est désormais portée par une demande émanant de la classe moyenne naissante. De 19 % du marché non-vie en 2005, cette branche a atteint 22,4 % de part de marché en 2010, selon la Fanaf. « De plus en plus, les populations veulent être bien assurées en raison de la défaillance des structures étatiques en matière de couverture maladie », explique Joël Muller, directeur général d’Axa Gabon. Du coup, les compagnies innovent. Sa société a ainsi lancé Double avis médical, qui permet au souscripteur de bénéficier de l’avis d’un second spécialiste lorsqu’un mal susceptible d’entraîner une intervention chirurgicale lui a été diagnostiqué. Mi-2012, le groupe panafricain d’origine ivoirienne NSIA a démarré la commercialisation de NSIA Hospitalis et NSIA Hospi. Deux produits grâce auxquels les assurés sont indemnisés des frais médicaux, chirurgicaux et d’hospitalisation. Au Cameroun, Activa va plus loin et s’intéresse aux retraités avec Activa santé troisième âge. « Au-delà d’un certain âge, explique Richard Lowe, son PDG, les assureurs refusent toute couverture. » D’après un autre assureur ouest-africain, ce créneau a un vrai potentiel, car il est constitué pour l’essentiel d’habitués des produits d’assurance, pris en charge pendant leur carrière par leur employeur.
Packages
l'image." class="caption" style="margin: 3px; border: 0px solid #000000; float: right;" height="351" width="90" />Si l’activité santé se développe, ce n’est pas pour autant la plus rentable. « C’est en réalité un produit d’appel parce que la probabilité de tomber malade pendant l’année est réelle, explique le patron d’Axa Gabon. Elle nous sert surtout à attirer les clients pour leur proposer d’autres types d’assurance. » En vie, par exemple. Activa Cameroun propose ainsi un système d’épargne pour financer plus tard les études de ses enfants. Quant à l’IFC (indemnité de fin de carrière) commercialisée par NSIA en Côte d’Ivoire – qui a connu un franc succès avant la crise postélectorale -, elle fait son retour. « Destinée aux entreprises, cette offre permet de constituer une cagnotte pour payer les indemnités de départ à la retraite ou de licenciement des salariés. Elle devrait bien marcher dans d’autres pays de la zone Cima [Conférence interafricaine des marchés d’assurances, NDLR] », soutient un cadre du groupe panafricain. Globalement, pour les particuliers comme pour les entreprises, les assureurs s’efforcent d’étoffer ou de renouveler leur offre chaque année ou presque. « La tendance consiste aujourd’hui à proposer aux clients des packages pour leur éviter de souscrire plusieurs contrats différents », précise l’assureur ouest-africain.
Les autres assurances (incendie, transports et risques divers) tirent également leur épingle du jeu. Ainsi l’assurance auto – obligatoire – continue de progresser grâce à l’expansion du parc automobile africain. Avec près de 1,4 million de véhicules neufs vendus tous les ans, ce parc rajeunit et fait évoluer la demande. Côté assureurs, « on adapte l’offre en y ajoutant des garanties comme l’assistance en cas de panne ou de vol, etc. », explique Richard Lowe.
La multiplication des grands projets d’infrastructures (routes, barrages…) constitue une autre aubaine pour les assureurs africains. « Les Chinois – qui décrochent la plupart de ces marchés en Afrique subsaharienne – souscrivent systématiquement des assurances auprès des compagnies locales », assure Pascal Le Lepvrier, directeur du réseau qui gère les agences de NSIA au Mali. Par ailleurs, les sociétés africaines intervenant aussi sur ces chantiers sont de plus en plus nombreuses à se couvrir. Au bénéfice des produits multirisques (construction, matériaux, transports, etc.).
Particuliers à conquérir
Malgré ces avancées, le taux de pénétration de l’assurance dépasse à peine 1 % sur le continent. Le principal défi consiste désormais à conquérir davantage le marché des particuliers. Swiss Re estime que les efforts doivent tenir compte de ses spécificités : « Une population majoritairement à faible revenu, exposée à des maladies infectieuses », précise le réassureur dans son dernier rapport. À cette fin, le développement de la micro-assurance est une piste. Pour une prime annuelle de 10 000 F CFA (15 euros), la filiale malienne de NSIA propose ainsi avec succès une assurance santé aux populations riveraines du fleuve Niger. Autre piste à explorer sur un continent où plus de 60 % de la population dépend du travail de la terre : l’assurance des risques agricoles. Des projets pilotes ont été mis en oeuvre, au Kenya par exemple, mais c’est en Inde que ce type d’assurance a connu un grand succès. Entre 2010 et 2011, plus de 9 millions d’agriculteurs ont été couverts, avec 258 millions de dollars de primes générées. À méditer.
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