Kadhafi récidive

Publié le 11 novembre 2007 Lecture : 2 minutes.

Mouammar Kadhafi n’est jamais là où on l’attend : qui aurait cru qu’il avait sinon des talents, du moins une vocation de scénariste ? Mais il faut se rendre à l’évidence, le « Guide » a bel et bien écrit le synopsis d’un film épique dont il souhaite confier la réalisation à Nadjat Anzour, un cinéaste syrien chevronné. C’est ce qu’a révélé, le 3 novembre, le quotidien britannique The Independent.
L’objectif du colonel est double : faire connaître au monde les souffrances endurées par les Libyens pendant l’occupation de leur pays par l’Italie (1912-1951) et célébrer le 96e anniversaire de la déportation de milliers de ses compatriotes dans des îles désertiques du sud de l’Italie. Kadhafi a donc écrit plusieurs scènes décrivant le pays tel qu’il était avant l’arrivée des Italiens : paisible, rustique et traditionaliste ; puis son brusque réveil sous l’affront de la colonisation. Intitulé L’Injustice, les années de souffrance, le film, dont le tournage débutera l’an prochain, est pourvu d’un confortable budget : 40 millions de dollars. Conformément à la volonté du « Guide », il sera doublé en plusieurs langues. Le casting sera très international, avec des acteurs britanniques, français, turcs et allemands (notamment), et la distribution planétaire.
Si Kadhafi s’implique à ce point dans ce projet, c’est qu’il veut faire reconnaître les exactions perpétrées contre son peuple comme un génocide, au même titre que ceux dont furent victimes les Juifs ou les Arméniens. Les Libyens furent, en effet, le premier peuple à connaître la terreur des bombardements aériens et parmi les premiers à suffoquer sous les gaz toxiques. Très tôt ils furent utilisés comme cobayes dans des camps de concentration. Selon les historiens, un tiers de la population fut exterminé entre 1911 et 1943 et un autre tiers contraint à l’exil. L’Injustice s’appuiera sur le témoignage de Francis McCullagh, un journaliste qui traversa jadis la Méditerranée dans les fourgons des envahisseurs italiens.
Ce n’est pas la première fois que Kadhafi se tourne vers le cinéma. Dans les années 1980, déjà, son régime avait produit un long-métrage intitulé Omar Mukhtar, le lion du désert, qui racontait la révolte d’un Bédouin libyen contre le régime imposé par Mussolini pendant la Seconde Guerre mondiale. Malgré un budget conséquent (30 millions de dollars) et un casting comprenant notamment Anthony Quinn dans le rôle-titre, le film fut un flop retentissant.

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