Nutrition, Plumpy’ Nut et sida

Publié le 10 décembre 2006 Lecture : 3 minutes.

Soyons clairs. La cause de l’infection par le sida n’est pas la dénutrition : c’est le VIH. Le traitement du sida n’est pas la renutrition : ce sont les antirétroviraux. Mais on sait maintenant que la dénutrition joue un rôle dans l’évolution de la maladie. En Afrique, l’amaigrissement est l’un des premiers signes du sida : rapide et sévère, il atteint souvent 20 % du poids du sujet. Une de ses caractéristiques est de s’accompagner d’une grande faim. Faute d’argent ou de nourriture, le malade ne peut l’assouvir. Mais souvent, ce sont les lésions du tube digestif (pharyngite, colite, parasitose, etc.) qui empêchent l’absorption ou l’utilisation des aliments disponibles.

L’amaigrissement apparaît d’autant plus vite que les besoins énergétiques des sidéens sont plus élevés que ceux des sujets sains : de 10 % au moins et jusqu’à 30-40 % en cas de tuberculose associée (voir J.A. n° 2378). Autre particularité, cette dénutrition touche plus les muscles (« qui fondent ») que les graisses. ?Elle est un facteur de mauvais pronostic, car elle aggrave l’immunosuppression et rend les malades particulièrement vulnérables aux affections opportunistes. D’où l’attention particulière apportée maintenant à la renutrition des patients.
Le traitement nutritionnel des adultes a évidemment bénéficié de l’expérience pédiatrique. En cas d’urgence, la voie veineuse est utilisable, mais elle nécessite des installations et une surveillance rarement disponibles. De nombreuses préparations orales ont été proposées et utilisées (F 100, laits thérapeutiques, SP 450, etc.). Toutes nécessitent une dilution dans une eau potable, avec une conservation très limitée et un risque de surinfection. Un très grand progrès, une révolution peut-être, est venu du docteur André Briend : il a observé qu’une pâte chocolatée aux noisettes, riche en calories et en suppléments alimentaires, était consommable directement. Très appréciée des enfants occidentaux, elle se conserve des mois hors du réfrigérateur. Il a alors demandé aux industriels de Nutriset de fabriquer pour les enfants africains une pâte attrayante, très énergétique, facile à conserver et à consommer de suite sans aucune préparation. Le Plumpy’ Nut, fabriqué à base de beurre d’arachide (25 %), avec du lait, des huiles végétales (colza, soja), du sucre et des vitamines est né. Un sachet de 92 g délivre 500 calories. Cette pâte se conserve deux ans environ. Après plusieurs tests de tolérance et d’efficacité, ce produit fut employé en 1999 par Médecins sans frontières chez les enfants dénutris du Niger avec 91 % de guérisons, 4 % de décès et seulement 5 % d’abandons du traitement.

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Après quelques essais chez les adultes, certaines organisations poussent à une utilisation de ce produit chez les malades atteints du sida. D’autres souhaitent une évaluation préalable des résultats, notamment dans le cas d’une association avec des antirétroviraux. L’intérêt de ce produit a conduit à rechercher d’autres RUTF (Ready to Use Therapeutic Food), comme le BP 100 au Danemark. Mais surtout, ces pâtes nutritives sont en voie de fabrication au Malawi et au Niger. On devrait ainsi pouvoir abaisser le coût d’une renutrition (environ 30 euros actuellement pour un traitement de deux mois chez un enfant). Ces RUTF faciles à utiliser sans hospitalisation sont un progrès incontestable. En ce qui concerne le sida, ils devraient apporter plus de confort aux malades et peut-être plus d’efficacité aux antirétroviraux.

L’auteur remercie le Dr André Briend (OMS) de sa disponibilité et des informations fournies. Cet article a aussi bénéficié des conseils du Pr Jean-Claude Melchior (Unité de nutrition, hôpital H.-Poincaré, Garches).

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