Société civile

Publié le 10 août 2008 Lecture : 5 minutes.

Durant les trois premières décennies de l’Algérie indépendante, le mouvement associatif national s’est réduit comme peau de chagrin. Suspecte aux yeux du parti unique, la société civile se résumait alors aux « organisations de masse », qui n’étaient rien d’autre que des satellites du FLN. En 1987 toutefois, le pouvoir lâche du lest, et l’Algérie s’inspire de la fameuse loi française de 1901 pour réglementer l’activité associative. Vingt ans plus tard, la société civile s’impose chaque jour un peu plus comme un partenaire essentiel des autorités dans l’élaboration des politiques publiques et la prise de décisions.

Nacer Djabi
53 ans, sociologue

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Son expertise et sa disponibilité font de Nacer Djabi l’un des rares sociologues algériens à s’exprimer régulièrement dans les colonnes de la presse locale et internationale. Professeur au département de sociologie de l’université d’Alger, chercheur au Centre de recherche en économie appliquée pour le développement (Cread), il est aussi l’auteur de plusieurs ouvrages sur les mouvements sociaux et politiques, le syndicalisme et le terrorisme. « J’ai été tenté par la sociologie, sous l’influence de mes amis. Je ne me voyais pas devenir magistrat ou avocat », a-t-il coutume de dire. Très sollicité à l’étranger, il anime de nombreuses conférences aux États-Unis, en Grande-Bretagne et dans le monde arabe.

Djillali Hadjadj
55 ans, Médecin et militant anticorruption

Délaissant ses patients et son cabinet médical d’Alger, il passe le plus clair de son temps à pourchasser les prévaricateurs, les prédateurs de l’économie nationale et les rentiers du système. Loin de sa ville natale, Khenchela (350 km à l’est de la capitale), il traque sans relâche corrupteurs et corrompus. Et s’invite dans les rédactions de la presse indépendante, notamment celle d’El Watan, pour y publier des enquêtes qui mettent au jour une multitude de scandales financiers. En 2001, il publie un recueil dans lequel il regroupe toutes les malversations qu’il a pu recenser. S’attaquant aux puissants, son activité lui vaut évidemment de nombreuses inimitiés, mais rien ne l’arrête. Son courage lui permet d’être très écouté à l’étranger, où il a reçu de nombreuses distinctions. Depuis 2004, il est le représentant officiel de l’ONG Tranparency International dans le pays.

Cherifa Kheddar
40 ans, présidente de l’association Djazaïrouna

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Sa vie a basculé le 24 juin 1996. Ce jour-là, un groupe terroriste a fait irruption dans la maison familiale et a égorgé sa sur, mitraillé son frère et blessé sa mère. Elle échappe de justesse à la tuerie. Depuis, Cherifa Kheddar consacre toute son énergie à la lutte contre le terrorisme. Elle a notamment créé l’association Djazaïrouna (5 000 adhérents) pour venir en aide aux familles et ayants droit des victimes de la barbarie islamiste.

Fatiha Brahimi
48 ans, magistrate

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Avant janvier 2007, Fatiha Brahimi, la quarantaine élégante, vivait dans l’anonymat. Mais depuis le début du procès de l’ancien milliardaire Rafik Abdelmoumen Khalifa, poursuivi pour faillite frauduleuse et banqueroute, la présidente de la cour pénale de Blida est devenue la coqueluche des médias. L’affaire est, en effet, restée comme la plus célèbre des annales judiciaires algériennes. Pendant toute la durée des audiences, Fatiha Brahimi, fille de juristes (son père était avocat et sa mère, greffière), a prouvé son savoir-faire. Sa maîtrise du dossier, ses connaissances en matière de procédures, son assurance devant des ministres cités à comparaître en qualité de témoins et ses répliques assassines lui ont même valu les éloges de la presse, qui la gratifia de surnoms flatteurs. « Grâce à vous, madame la présidente, on s’est cru dans un État de droit », lui lança aussi un avocat à l’issue du procès, en mars 2007. Sa performance a permis de faire avancer le combat des féministes, dans un pays musulman où la femme est considérée comme incapable de dire le droit.

Khaled Bourayou
54 ans, avocat

Impossible d’imaginer un procès contre des journalistes sans la présence dans le prétoire de cet homme de droit, portant majestueusement sa robe d’avocat. Depuis qu’il est devenu, au début des années 1990, le conseiller attitré des journaux indépendants, il a plaidé quelque 500 affaires de diffamation, d’outrage, d’atteinte à l’image ou à la réputation des institutions et des responsables politiques algériens. Bref, il fait figure de vrai spécialiste des délits de presse. Tribun hors pair, hâbleur et gouailleur, il peut plaider aussi bien en arabe qu’en français. Ses plaidoiries, théâtralisées à la perfection et ponctuées de nombreux effets de manches, amusent parfois les présidents des tribunaux et les indisposent souvent.

Hocine Zahouane
73 ans, militant des droits de l’homme

Né en 1935 en Kabylie, il rallie le mouvement nationaliste à 15 ans, avant d’entrer au FLN. Arrêté en 1955, il rejoint le maquis dès sa sortie de prison en 1957, et devient officier de la wilaya III. Membre du bureau politique du FLN à l’indépendance, il incarne, avec Mohamed Harbi et Bachir Hadj Ali, l’aile gauche du parti unique. En 1965, il condamne le coup d’État de Boumedienne et entre dans la clandestinité pour créer l’Organisation de la résistance populaire (ORP), mais il est une nouvelle fois arrêté, trois ans plus tard, par la Sécurité militaire. Malgré son passé de militant anticolonialiste, il est assigné à résidence. Libéré en 1970, il choisit de s’exiler en France et ne revient au pays qu’en 1978, à la mort du président Boumedienne. Élu en 2005 à la tête de la Ligue algérienne de défense des droits de l’homme (LADDH), il y effectue un mandat de deux ans, avant d’être démis de ses fonctions. N’accordant aucune légitimité à la nouvelle direction de la Ligue, il est aujourd’hui encore en conflit avec ses anciens collègues.

Meziane Meriane
50 ans, syndicaliste

Fondateur du Syndicat national autonome des professeurs de l’enseignement secondaire et technique (Snapest), qu’il a lancé à l’occasion d’un conflit social en janvier 2006, Meziane Meriane et son organisation ont des revendications qui portent sur la revalorisation des salaires et du métier d’enseignant. Auparavant, l’homme, qui a le syndicalisme chevillé au corps, était coordinateur national d’une autre organisation, le Cnapest (Conseil national autonome des professeurs de l’enseignement secondaire et technique). Alors que les mouvements autonomes obtiennent rarement l’agrément du pouvoir, celui qu’il a créé a rapidement décroché la sienne, en 2007 Raison pour laquelle les syndicats non agréés l’accusent d’avoir fait trop de concessions aux autorités.

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