Le pape ? Quel pape ?

Publié le 10 avril 2005 Lecture : 2 minutes.

Dimanche 3 avril, à l’heure de la grand-messe. À l’église catholique Regina Mundi de Soweto, les fidèles ne sont pas plus nombreux qu’à l’ordinaire. La pluie, ininterrompue en cette période de l’année, et la fin des congés scolaires ont sans doute dissuadé certaines familles de la paroisse – huit cents, au total – de se rendre à l’office. À la radio, les programmes n’ont pas été bouleversés. Rien, aucune émission spéciale consacrée à la mort de Jean-Paul II. Apparemment, les Sud-Africains sont restés majoritairement indifférents à l’événement.

Les catholiques sud-africains ne sont que 3,5 millions (7 % de la population) et appartiennent surtout à des communautés rurales noires et pauvres. Ils se signalent par une pratique modérée et dépassionnée de leur religion. Même si le Vatican a récemment donné son feu vert à une adaptation du culte aux traditions africaines, l’Église catholique ne fait pas vraiment recette et ne constitue pas une concurrence sérieuse pour les anglicans et les évangéliques, beaucoup plus démonstratifs et influents. Pourtant, les catholiques jouissent d’une bonne image dans l’opinion, en raison de leur engagement passé dans la lutte contre l’apartheid. Regina Mundi, par exemple, a souvent servi de refuge aux manifestants de Soweto lors des émeutes durement réprimées de 1976… Reste que, dans ce pays qui compte plus de 30 % de séropositifs, les prises de position du pape hostiles à l’usage du préservatif ont semé le trouble chez les fidèles et n’ont pas contribué à attirer les foules.
Bref, les Sud-Africains ne ressentent pas pour Jean-Paul II un attachement affectif particulier. Il est vrai que d’autres facteurs entrent certainement en ligne de compte pour expliquer ce phénomène : le très (trop ?) petit nombre de visites qu’il leur a rendues, l’éloignement géographique avec Rome, le fossé culturel avec les pays latins… Pourtant, en 1995, sa visite à Johannesburg, où il avait rendu compte du synode africain de l’année précédente, avait été très appréciée. Comme à son habitude, le pape avait, à son arrivée, embrassé le sol sud-africain.

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Bien entendu, Nelson Mandela, Thabo Mbeki et Desmond Tutu, l’ancien archevêque anglican du Cap, ont rendu hommage au défunt pape, dès le lendemain de sa mort. Celui-ci n’avait-il pas, en 1984, dénoncé l’apartheid et refusé de se rendre dans le pays tant que les Noirs n’auraient pas obtenu leur liberté ? « Il a donné au monde une direction morale et des lignes de conduite », a commenté « Madiba », qui l’avait rencontré à plusieurs reprises. Quant à Mgr Tutu, il a recommandé aux cardinaux appelés à élire le successeur de Jean-Paul II de choisir un Africain. Les dignitaires catholiques sud-africains auraient bien besoin de ce coup de pouce pour renforcer les rangs des fidèles…

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