La loi belge fait à nouveau frémir

Publié le 9 octobre 2005 Lecture : 2 minutes.

Ils avaient été nombreux à respirer, en août 2003, quand le législateur belge avait modifié la loi dite de compétence universelle. Depuis 1993, cette législation unique au monde autorisait les tribunaux belges à juger les crimes contre l’humanité, les crimes de guerre ou de génocide perpétrés dans le monde entier, quelle que soit la nationalité de leurs auteurs ou de leurs victimes. Dès lors que le tribunal compétent répondait à des critères démocratiques de justice universelle et équitable (droit à la défense, présomption d’innocence), pourquoi ne pourrait-on pas y juger des hommes qui avaient violé le droit international et porté atteinte, par là même, à toute l’humanité, avait estimé la Belgique ?
Mais les ennuis causés à la diplomatie belge par certaines plaintes déposées à Bruxelles (notamment contre l’ancien président George H. Bush) ont amené les députés à restreindre la portée du texte. Depuis 2003, il ne s’applique que si l’auteur présumé des crimes ou la victime est belge, et si cette dernière vit depuis trois ans au moins dans le royaume. La loi intègre également les règles internationales de l’immunité pour les dirigeants politiques et les responsables militaires en exercice au moment du dépôt de la plainte. L’amendement a donc rendu immédiatement invalides les plaintes déposées contre l’Israélien Ariel Sharon, le général américain Tommy Franks, le Rwandais Paul Kagamé, le Congolais Denis Sassou Nguesso, le Cubain Fidel Castro, ou encore Abdoulaye Yérodia Ndombasi, actuellement vice-président de la République démocratique du Congo.
En revanche, comme l’a prouvé l’affaire Hissein Habré et le mandat d’arrêt international émis à son encontre par le juge Daniel Frensen, la loi de compétence universelle est loin d’être totalement caduque. Si les plaignants sont belges, la procédure peut suivre son cours. À la suite du dictateur tchadien, d’autres ex-dirigeants pourraient être à nouveau mis en cause devant les tribunaux belges. Le Mauritanien Maaouiya Ould Sid’Ahmed Taya, le Centrafricain Ange-Félix Patassé ou le Libérien Charles Taylor, par exemple, ne sont plus protégés par leur immunité présidentielle. Pas plus que ne l’est l’ancien président iranien Hashemi Rafsandjani ou le Chilien Augusto Pinochet. Reste que leurs accusateurs devront prouver qu’ils résident depuis plus de trois ans dans le plat pays et qu’ils en possèdent la citoyenneté avant que le procureur fédéral donne lui-même son accord à l’ouverture d’une procédure. La justice internationale fait donc doucement son chemin… et des émules. Le 5 octobre, le Tribunal constitutionnel de Madrid a décidé que la justice espagnole était compétente pour juger les crimes contre l’humanité commis hors du territoire et par des non-Espagnols.

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