David Noko

En favorisant sa nomination à la tête de la division sud-africaine de De Beers Consolidated Mines, la politique de « Black Economic Empowerment » marque des points.

Publié le 9 octobre 2005 Lecture : 3 minutes.

« Nous revenons de loin. L’Afrique du Sud a parcouru un chemin semé d’embûches depuis la découverte des diamants en 1867, et les périodes de souffrance et de conflits qui se sont ensuivies et qui ont divisé notre peuple pendant plus d’un siècle. » Inaugurant en 2001 à Springs le laboratoire de recherches de De Beers, le géant minier de son pays, Thabo Mbeki résumait ainsi la triste histoire de l’exploitation des ressources naturelles sud-africaines qui s’est accompagnée de celle des populations noires. Pourtant, fidèle à la stratégie de son prédécesseur Nelson Mandela, le président de la nation Arc-en-Ciel n’a pas voulu s’aliéner les industriels blancs qui participent du rayonnement économique de l’Afrique du Sud sur le continent.
Aujourd’hui, le « partenariat » entre le Congrès national africain (ANC) et les entreprises minières – encore entre les mains de la minorité blanche – commence à porter ses fruits : les Blancs n’ont pas été chassés du pays, mais les Noirs accèdent de plus en plus à l’entreprise et au capital.
Le 29 septembre, l’annonce de la nomination de David Noko à la tête de la division sud-africaine de De Beers Consolidated Mines – l’entité la plus importante de l’empire De Beers – est une illustration du succès de cette politique de « Black Economic Empowerment » (BEE) lancée par le gouvernement Mbeki, et destinée à favoriser la participation des Noirs à l’économie du pays. Premier Noir à accéder à des responsabilités de très haut niveau, dans la première entreprise mondiale d’extraction de diamants de surcroît – huitième entreprise sud-africaine et neuvième du continent en termes de chiffres d’affaires -, Noko sera aussi l’un des rares à occuper un fauteuil de taille sans être issu de la dynastie Oppenheimer. Il entre ainsi dans l’histoire d’une compagnie centenaire, créée en 1888 par Cecil John Rhodes, « père » de l’empire colonial britannique en Afrique australe.
À 48 ans, ce fils de fermier pénètre ainsi dans le club des Noirs empowered – « à qui l’on a rendu le pouvoir », pourrait-on traduire. À la suite d’un Patrice Motsepe, PDG d’Harmony et premier milliardaire noir d’Afrique du Sud, ou d’un Tokyo Sexwale, fondateur et PDG de Mvelaphanda Holdings, troisième compagnie d’extraction de diamants, il vient rallonger la liste de plus en plus longue des black businessmen. Directeur, depuis 2002, des opérations des mines de Kimberley détenues par De Beers, au nord-ouest du pays, il prendra au second semestre 2006 la place de Jonathan Oppenheimer, 36 ans et héritier de la famille, à la direction sud-africaine de De Beers Consolidated Mines. Ce dernier rejoindra son père Nicky au sommet de la hiérarchie du groupe, tout en dirigeant les mines canadiennes, dont l’exploitation est prévue pour 2008. « La famille Oppenheimer a joué un rôle pivot dans le développement de l’industrie minière de ce pays », rappelait Mbeki en 2001. « Le rôle du secteur privé en partenariat avec le gouvernement est fondamental si nous voulons réussir la nouvelle période de l’Histoire qui s’ouvre à nous. »
Cette évolution du groupe De Beers fait suite aux pressions du gouvernement, dont certains ministres avaient critiqué une équipe dirigeante essentiellement masculine et dominée par des Blancs. Certes, David Noko possède toutes les qualités requises pour remplir sa mission. Ce père de trois enfants, marié à une infirmière, est titulaire d’un MBA de l’université écossaise d’Heriot-Watt. Il a commencé sa carrière comme ingénieur, puis manager chez Pepsi-Cola International et au sein des Brasseries sud-africaines (South African Breweries). Avant d’entrer chez De Beers, il était PDG d’Airchefs, la principale entreprise sud-africaine de restauration à bord des avions. À la tête des mines de Kimberley depuis trois ans, il a fait remonter la production à 2 millions de carats en 2004, un record qui n’avait pas été atteint depuis 1914. Serait-il parvenu à son futur poste sans l’aide du système de BEE qu’on ne trouve qu’au pays de Mandela ?

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