Vos lettres ou courriels sélectionnés

Publié le 9 avril 2006 Lecture : 11 minutes.

Racisme au quotidien
– J’ai rencontré le racisme dans la rue, à Marrakech. Chez moi, à Mayotte, je vis le racisme avec philosophie, c’est-à-dire sans trop m’en soucier. Quand il y a des Blancs qui ont tous les privilèges et des Noirs autochtones dépourvus de tout, quelque chose ne tourne pas rond. Mais c’est une autre histoire
À Marrakech, je suis tombé de haut alors que je demandais simplement mon chemin à un jeune couple. L’homme me dit, en français, le regard ailleurs comme s’il s’adressait à l’univers : « Ici, on ne parle pas français, mais arabe. » J’ai eu un sourire amer. Tout de suite je me suis rappelé de Jeune Afrique/ l’intelligent n° 2270 du 17 juillet 2004 qui traitait du racisme au Maghreb. Bravo J.A.I., aujourd’hui J.A., pour votre clairvoyance sur cette question !
I.M. M’Dahoma, conseiller municipal de Pamandzi, Mayotte

Une leçon d’intelligence
– Vous avez raison de toujours permettre au groupe de presse que vous avez créé depuis plus de quarante ans de grandir et de se renforcer en s’adaptant sans cesse aux évolutions de l’Afrique et du monde. C’est ce qui explique que Jeune Afrique se soit hissé et maintenu au niveau des magazines internationaux de premier plan et soutienne la comparaison avec les meilleurs. Je vous renouvelle mes compliments pour cela. En tant qu’Africain, j’en suis fier.
J’ai lu le n° 2355, dans lequel vous annonciez la reprise du nom « Jeune Afrique » et j’approuve pleinement cette mesure. En effet, lorsque vous aviez choisi l’appellation « l’intelligent », je vous avais écrit pour vous signifier mon scepticisme désapprobateur.
Au bout de quelques années, vous reconnaissez que « ça n’a pas marché. » Vous donnez là une leçon de sagesse, d’humilité et… d’intelligence. La pratique que j’ai des hommes en général et des « grands » en particulier, m’a appris qu’ils avouent rarement s’être trompés.
Nous devrions tous en prendre de la graine et l’Afrique s’en porterait certainement mieux.
Casimir Oyé Mba, Libreville, Gabon

la suite après cette publicité

Prévenir d’abord
– J’ai beaucoup apprécié l’article du Pr Edmond Bertrand (voir J.A. n° 2359), mais il parle de médecine curative. À mon avis, c’est la médecine préventive qui est la plus indiquée pour nos pays pauvres. De nombreux praticiens décident d’interventions chirurgicales sans avoir touché le malade, sans lui avoir posé de questions sur son mode de vie, son alimentation, sa pratique d’un sport, etc. Je souhaiterais que nos praticiens se penchent davantage sur la pratique préventive, moins coûteuse et malheureusement délaissée.
Jean-Marie Akpwabot, Abidjan, Côte d’Ivoire

Tempête dans un verre d’eau
– Rarement le changement de titre d’un journal n’a eu autant d’écho dans le monde, surtout en Afrique. B.B.Y. a décidé, malgré de nombreuses lettres de protestation, de maintenir le titre de Jeune Afrique/l’intelligent et cela, pendant six ans. Il évoque dans le n° 2355 les raisons stratégiques d’internationalisation de ce journal qui, à la base, était destiné aux Africains.
A-t-on besoin de changer le titre d’un journal pour éveiller l’intérêt des lecteurs non africains ? Permettez-moi d’en douter. Jeune Afrique est, depuis très longtemps, un patrimoine, un hebdomadaire, qui, à mon sens, pouvait s’internationaliser progressivement sans modification de titre, mais avec des méthodes innovantes de publicité. Que dire de ce vieux lecteur fervent qui, dans son village, a demandé à lire Jeune Afrique et, quand on lui a apporté Jeune Afrique/l’intelligent, réitéra sa demande afin de lire Jeune Afrique et non l’intelligent…
Ce changement de titre fera partie de l’histoire de B.B.Y. et on lui reconnaîtra sa qualité d’homme sage et impartial. Je lui trouve un charisme proche de celui de l’ancien président ivoirien Félix Houphouët-Boigny. Celui-ci savait, en pleine tempête politique, réfléchir, analyser avant de reculer.
Latif Camara, Neuchâtel, Suisse

Émigrés tunisiens en Libye
– Je suis tunisien, établi en Belgique, enseignant à l’Université catholique de Louvain. Je salue votre journal pour ses capacités à nous faire comprendre les arcanes de la politique et de monde. Le retour au titre originel (Jeune Afrique) est plus que salutaire.
Mais je vous écris pour une autre raison : pourquoi le gouvernement tunisien ne protège-t-il pas ses ressortissants qui partent travailler en Libye ? Il lui faudrait négocier avec les autorités libyennes des contrats de travail en bonne et due forme, qui garantissent les droits de ses émigrés. Je suis originaire de Médenine, dans le sud de la Tunisie. J’ai rencontré plusieurs compatriotes qui sont rentrés sans un sou au pays, après plusieurs années passées en Libye, expulsés sans préavis par un patron sans scrupules (quoique musulman et ayant accompli son pèlerinage à La Mecque). J’en connais qui ont été expulsés manu militari par les autorités, ramassés dans la rue ou sur leur lieu de travail et jetés comme des pestiférés à la frontière tuniso-libyenne, sans argent, ni papiers, ni affaires personnelles. Des accords visant à améliorer les conditions de travail des émigrés tunisiens en Libye et à leur assurer leurs droits sont plus que nécessaires, conformément aux droits de l’homme et de la famille.
Hédi Fantar, Waterloo, Belgique

Mon frère et moi
– Mon attention a été attirée par l’article intitulé « À l’heure du duel » (voir J.A. n° 2358). Il y est écrit : « Entouré de ses fidèles lieutenants, Timothée Zannou (directeur de campagne) et Noureini Tidjani-Serpos (directeur général adjoint du département Afrique à l’Unesco), Adrien Houngbédji préfère se présenter comme le candidat de la continuité. » Votre collaborateur m’a confondu avec mon frère, Ismaïla Tidjani-Serpos, président du groupe PRD à l’Assemblée nationale béninoise. Je ne me serais pas senti gêné d’être sur le terrain pour « entourer » Me Houngbédji, mais tel ne fut pas le cas, et j’ai été doté d’un don d’ubiquité que je n’ai malheureusement pas.
Noureini Tidjani-Serpos, directeur général adjoint du département Afrique, Unesco, Paris

la suite après cette publicité

Les Arabes et le pétrole
– Je pense que les Arabes du XXe siècle n’ont pas eu suffisamment de génie pour profiter pleinement de la manne pétrolière, véritable cadeau divin.
1. Avec le pétrole, nerf du développement dont dépend l’Occident, les Arabes auraient pu imposer à l’Europe et aux États-Unis le règlement du conflit israélo-palestinien, la création d’une Palestine indépendante et la libération du troisième Lieu saint de l’islam, la mosquée d’Al-Aqsa ;
2. Les pays pétroliers du Golfe ainsi que l’Algérie auraient dû aider les autres pays arabes à accélérer leur développement et supprimer l’analphabétisme, ce qui aurait créé un espace panarabe émancipé et fort, ayant son mot à dire sur l’échiquier international ;
3. Les pays pétroliers auraient dû être généreux avec les Africains du sud du Sahara, nos voisins et nos semblables auxquels l’Histoire nous lie. C’était une obligation morale et religieuse.
Que d’occasions historiques ratées Le pétrole a été, pour les Arabes et les Africains, une malédiction. Il ne nous assure même pas le minimum de dignité et de développement scientifique et technologique. Nizar Kabanç, le grand poète syrien aujourd’hui disparu, n’a-t-il pas dit : « Le pétrole, ce liquide spermatique, est la boisson de nos dictateurs et non pas celle du peuple. »
Héni Sarkis, Malakoff, France

Rwanda : regarder vers l’avenir
– De retour en France après quarante et un ans passés au Burkina Faso, je suis abonné depuis trois ans à Jeune Afrique, et tous les membres de ma cité le lisent ainsi que les gens de passage.
J’ai apprécié votre article sur cette femme tutsie qui, au lieu de s’attarder sur son passé, regarde vers l’avenir et s’engage pour que les orphelins retrouvent une famille et aient un métier (voir J.A. n° 2358). Je l’ai photocopié et envoyé au directeur des Presses de la Renaissance, suite à la publication du livre de Révérien Rurangwa intitulé Génocidé.
Bernard Fagnon, Paris, France

la suite après cette publicité

Afrique pas si jeune
– Pourquoi ne pas rebaptiser votre revue Pas (si) Jeune Afrique puisque vous êtes dans votre 46e année ?
Un lecteur occasionnel, Kairouan, Tunisie

Erreur de date
– J’aime à lire Jeune Afrique, dont j’apprécie la diversité d’informations. Permettez-moi toutefois de signaler une erreur dans le numéro 2357 du 12 au 18 mars 2006. Cette erreur est située en page 33, dans le communiqué intitulé « Propos de l’ambassadeur de la République démocratique du Congo en France ». Dans une question posée à l’ambassadeur, je relève ce qui suit : « Le 18 novembre 2005, une étape importante dans le processus politique a été franchie. En effet, le peuple congolais a répondu massivement par un oui au référendum. [] » À ma connaissance, ce référendum s’est tenu les 18 et 19 décembre 2005 et non le 18 novembre.
Nshole-Olamwize-Patrick, Kinshasa, RD Congo
Réponse : Vous avez raison, et c’est l’intervieweur qui a tort. Comme vous l’avez remarqué, néanmoins, ces propos entrent dans le cadre d’un message publicitaire dûment présenté comme tel. Ils n’engagent donc pas la rédaction de Jeune Afrique.

Trop de jours fériés
– Je pense qu’il y a trop de jours fériés en Tunisie. La plupart des Tunisiens, les jeunes surtout, en ignorent le bien-fondé et les considèrent simplement comme un cadeau du ciel et une raison pour chômer. Tout le monde en abuse. Si le jour férié est un mardi, la plupart des fonctionnaires ne se rendent pas à leur travail le lundi. C’est ce qu’on appelle communément « faire le pont » de dimanche à mardi. Ce comportement provoque un ralentissement des prestations administratives et l’ire des chefs d’entreprise. Pourquoi, par exemple, ne pas supprimer la fête de la femme, ou celle de la jeunesse, ou celle de Mouled, qui rend hommage à la naissance du prophète Mohammed et que l’Arabie saoudite elle-même, pays qui l’a vu naître, ne célèbre pas simplement parce que ce n’est pas inscrit dans l’islam. Réduire le nombre de jours chômés permettrait aux Tunisiens d’engranger des millions de dinars. Ce serait un pas vers le progrès.
Fatima Daboussi, Hammam Bourguiba, Tunisie

Chapeau, le Bénin !
– Entre ténèbres et enfer, entre pessimisme et condescendance, un événement vient de nous réveiller et de nous faire croire que l’Afrique au sud du Sahara n’est pas seulement celle que certains médias (occidentaux) présentent, c’est-à-dire celle des enfants errants, des morts sur les rivages d’Italie ou d’Espagne, celle des damnés de la Terre.
L’événement, c’est l’élection présidentielle au Bénin. Petit pays, pas très riche mais dynamique, plein de volonté et qui montre la voie. Dans ce pays, le peuple souverain a parlé, et il a été entendu et respecté. Chapeau ! Cet exemple devrait servir aux autres peuples qui acceptent encore, dans une passivité morbide, des règles du jeu que l’on change pour se maintenir au pouvoir éternellement. Félicitations au président Yayi Boni et longue vie au peuple béninois.
Narcisse Elenga Yasso, Wolfhausen, Suisse

Boualem Sansal a raison
– À travers l’article consacré à Boualem Sansal, (voir J.A. n° 2359) j’ai éprouvé un réel plaisir à lire des propos qui ne font que refléter la réalité de la vie au sein de la maison Algérie. Boualem Sansal a mille fois raison lorsqu’il révèle à des milliers de lecteurs le vrai visage de l’Algérie. Certains détracteurs iront jusqu’à dire qu’il renie sa patrie, mais au contraire il agit en tant qu’Algérien convaincu et en rébellion contre des institutions qui n’ont fait que bafouer l’honneur du peuple algérien.
Où est l’Algérie pour laquelle tant sont morts entre 1954 et 1962 ? Où est cette Algérie sociale promise par tous les gouvernements depuis 1962 ? Ma pensée rejoint celle de Boualem Sansal à propos de l’imposture arabo-musulmane. L’Algérie, un pays arabe ? Réveillons-nous ! Il existe bien une culture arabe, cependant force est de constater que toutes les politiques d’arabisation n’ont fait qu’échouer depuis l’indépendance. L’Algérie est avant tout un pays berbère, et tant que cette berbérité ou amazighité ne sera pas pleinement assumée, la nation algérienne ne sera pas épanouie et achevée.
Les islamistes sont toujours là, Boualem Sansal nous le fait clairement ressentir, à travers leur présence de plus en plus pesante dans ce média lourd qu’est l’Entreprise nationale de télévision (ENTV) : suppression de la Star Academy arabe, diffusion des appels à la prière, etc. J’ajouterai, à propos de l’islam : combien de présidents depuis l’indépendance l’ont bafoué ne serait-ce qu’en prêtant serment sur le Coran ?
À lire les propos de Boualem Sansal, chacun est en droit de se demander si l’Algérie ne s’engage pas dans une impasse. Cependant, il existe une chose dans ce pays, qui ne cessera d’exister malgré les embûches dressées par le pouvoir, c’est la liberté d’expression et la presse indépendante.
Lakhdar Boussaha, Soyaux, France

Chine : 3e puissance économique mondiale
– Dans son éditorial paru dans le J.A.I. n° 2351, B.B.Y. décrit un « Un monde nouveau », dans lequel la Chine serait la troisième puissance économique mondiale, déclassant l’Allemagne. Selon la citation évoquée par B.B.Y., la Chine détrônerait le Japon en 2020 et les États-Unis en 2040. Pourriez-vous m’expliquer les origines et les fondements de cette « évolution fulgurante », selon vos propres termes ?
Hatem Azouz, Khézama, Tunisie
Réponse : D’abord, quelques mots sur la réévaluation du produit intérieur brut (PIB) de la Chine. Vous savez que le PIB est la valeur des productions nettes de biens et de services réalisées par les particuliers et les entreprises d’un pays au cours d’une année. La qualité de cet indicateur économique majeur dépend évidemment de la collecte statistique (fiabilité et couverture territoriale). Cet outil est très performant dans les pays industrialisés (les plus expérimentés). Il l’est moins dans les pays en développement. Dans ces pays, l’« économie informelle » – parce que non comptabilisée ou non comptabilisable – est relativement importante : elle représente 30 % à 50 % voire plus du PIB.
C’est cette économie-là que le Bureau national des statistiques a essayé de traquer : résultat, le PIB de la Chine a été réévalué de 278 milliards, passant à 1 980 milliards de dollars en 2004. Plus de 90 % de cette augmentation a été découverte dans le secteur des services (commerce, immobilier, télécommunications, transports, restauration). Du coup, la part globale de ce secteur dans le PIB est passée de 32 % à 41 %. Ce qui est le signe d’une économie plus moderne (dans les pays industrialisés, les services assurent 50 % ou plus du PIB) et donc moins tributaire des secteurs primaire (agriculture, pêche, forêt, mine) et secondaire (industrie).
Selon les observateurs de l’économie chinoise, le secteur des services est encore sous-estimé d’au moins 200 milliards de dollars. L’on devrait donc s’attendre à un nouveau bond en avant du PIB de la Chine.
De 1979 à 2005, la croissance réelle (inflation déduite) a atteint un taux de 9,6 % en moyenne par an, soit trois à quatre fois le taux des pays industrialisés. En pronostiquant simplement la poursuite de cette progression d’ici à 2010, nos calculs donnent un rattrapage de l’Allemagne dès 2009 (voir graphique).

La Matinale.

Chaque matin, recevez les 10 informations clés de l’actualité africaine.

Image

Contenus partenaires