Leçons chinoises

Que ce soit en maths, en sciences ou en langues, les écoliers de Shanghai et de Pékin devancent désormais largement les petits Américains.

Publié le 8 octobre 2006 Lecture : 3 minutes.

Nul ne peut visiter la Chine sans être éberlué par les autoroutes et les gratte-ciel qui surgissent de partout et par tous ces chantiers qui se suivent en rangs serrés, faisant de la grue l’oiseau emblématique du géant asiatique. Mais de tous les investissements de modernisation que réalise la Chine, ceux qu’elle consent dans le capital humain sont les plus impressionnants. Soyons clairs : nombreux sont les jeunes Chinois de Shanghai et de Pékin à recevoir une meilleure éducation élémentaire et secondaire que les élèves américains.
Au cours d’un récent voyage en Chine, je me suis fait accompagner par une spécialiste de l’enseignement primaire, ma fille, qui est en CE2. Ensemble, nous avons assisté à des cours dans les quartiers urbanisés de Shanghai et dans un village situé près de la Grande Muraille. Un groupe d’enseignants shanghaiens à qui j’avais montré des échantillons de devoirs faits par ma fille ne lui ont laissé aucune illusion ; à son grand déplaisir, ils les ont jugés tout juste du niveau du CP dans une école locale. En maths, en sciences et en langues étrangères, les élèves chinois sont indiscutablement plus avancés.
Bien sûr, le système éducatif chinois connaît aussi des problèmes. Les universités sont généralement médiocres, et le niveau est souvent faible dans les zones rurales. En juillet, l’Asia Society a publié un excellent rapport : « L’enseignement des maths et des sciences à l’âge de la mondialisation : ce que les États-Unis peuvent apprendre de la Chine. » Et le rapport trouve ample matière à réflexion dans la rigueur des programmes chinois en maths et en sciences.
Il n’y a pas de miracle. Si les écoliers chinois sont meilleurs en maths et en sciences que les Américains, c’est qu’ils travaillent davantage. En additionnant travail en classe et à la maison, ils ont des horaires doubles de ceux des Américains. Ils doivent, par exemple, pendant leurs deux mois de congés d’été, faire chaque jour plusieurs heures de devoirs de vacances. Les écoliers américains, eux, passent chaque année le mois de septembre à réapprendre ce qu’ils ont oublié pendant l’été. Le gouvernement chinois a développé un cursus national exigeant, permettant à la quasi-totalité des lycées de suivre des cours de biologie avancée et de calcul différentiel. Par comparaison, les Américains du même âge sont seulement 13 % à étudier le calcul différentiel, et moins de 18 % à suivre des cours de biologie avancée.
Et si le gouvernement chinois prend les maths et les sciences au sérieux, les parents ne sont pas en reste. À l’école primaire Cao Guangbiao de Shanghai, j’ai demandé à une petite fille de CE2, Li Shuyan, de m’indiquer ses horaires quotidiens. Elle se lève à 6 h 30 et passe toute la journée soit à ses études, soit à la pratique de deux instruments de musique. Et quand elle a fini son travail, et qu’il lui reste du temps libre dans la soirée, regarde-t-elle la télévision ou passe-t-elle du temps avec ses amies ? « Non, dit-elle. Dans ce cas, je révise et je fais des exercices supplémentaires. » Un de ses camarades, Jiang Xiuyuan, explique qu’au cours des vacances estivales son père le laisse regarder la télévision tous les soirs pendant dix minutes. Si les Chinois exagèrent quelque peu, les Américains sont tombés dans l’excès inverse. Leurs enfants passent en moyenne 900 heures par an à l’école et 1 023 heures devant la télévision.
Un des grands défis de ce siècle sera de contrôler les manipulations génétiques sur l’espèce humaine. Les diplômés chinois sont probablement mieux préparés à prendre les décisions adéquates que les diplômés américains.
Pendant le règne de la dynastie Qing, qui a pris fin en 1912, la Chine a tardé à suivre l’exemple de l’étranger et à ajuster ses programmes d’enseignement ; le prix payé a été son incapacité à lutter à armes égales contre les puissances occidentales. Aujourd’hui, la roue a tourné, et c’est aux Américains d’apprendre de la Chine.

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