Mutation accélérée

Publié le 8 juillet 2007 Lecture : 2 minutes.

Les cérémonies marquant le 13e anniversaire de la Journée de libération du Rwanda se sont déroulées le 4 juillet dans une atmosphère d’insouciance. Une foule nombreuse a fait la queue devant le stade Amahoro pour assister au défilé auquel participaient, outre les militaires et les unités de la police nationale, des membres des associations civiles. Alors que dans les autres pays du continent la célébration de l’indépendance est ponctuée par une suite de discours plus ennuyeux les uns que les autres, deux orateurs seulement se sont succédé à la tribune : le maire de Kigali, le docteur Aisa Kirabo Kakira, et le président Paul Kagamé.
De retour d’Accra, où il a participé au sommet de l’UA, le président Kagamé a prononcé un discours à forte tonalité panafricaine. L’intégration de tous les États africains ne sera possible que lorsqu’ils auront atteint le même niveau de développement, a-t-il martelé. Kagamé a également profité de l’occasion pour proposer sa définition du patriote : quelqu’un qui place le bien du pays avant ses propres intérêts et ceux de sa famille. Une attaque dirigée contre les vétérans du parti au pouvoir qui possèdent de grands domaines cultivables, mais ne font rien pour les développer. Or l’exode rural causé par la pénurie de terres cultivables commence à menacer dangereusement la stabilité sociale. Le président Kagamé s’est personnellement déplacé la semaine précédente dans les provinces orientales, où le problème de la pénurie des terres a pris une ampleur inquiétante.
Mais attention, ici, insouciance ne rime pas avec désintérêt. Le régime attache au contraire une grande importance aux commémorations nationales. Ces cérémonies ne servent pas seulement à célébrer le passé, elles poursuivent également un objectif politique dans la mesure où elles aident à reconstituer un sentiment national à même de transcender les divisions ethniques dont le pays a longtemps souffert. Le clou de la journée a été, comme les années précédentes, la cérémonie de remise des médailles aux militaires et aux civils pour des actes de courage accomplis pendant la guerre de libération.
Le Rwanda traverse en ce moment une période de mutation. Sa brouille très médiatisée avec la France au sujet du rôle de Paris dans l’attentat qui coûta la vie au président Habyarimana (et déclencha le génocide de 1994) a atteint son apogée en novembre 2006 avec l’expulsion de l’ambassadeur français et la rupture des relations diplomatiques entre les deux pays. Une rupture qui a eu pour conséquence d’accélérer l’intégration du Rwanda dans l’Afrique orientale anglophone. Depuis le 1er juillet, le Rwanda et le Burundi sont devenus membres à part entière de la Communauté d’Afrique orientale (EAC), avec laquelle ces deux pays effectuent l’essentiel de leurs échanges commerciaux. Vu l’état des infrastructures des pays de l’Afrique centrale, on comprend aisément pourquoi.
Le bilinguisme (anglais-français) du Rwanda sera sans doute un atout pour l’EAC. D’ailleurs, si le rêve d’un Parlement panafricain se réalise un jour, ce sera en grande partie grâce à des pays bilingues comme le Rwanda ou le Cameroun, qui pourraient servir de passerelle entre les pays francophones du nord et de l’ouest et les pays anglophones de l’est et du sud du continent.

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